Le côté Lelouchien de Soderbergh

Un membre de la pègre est embauché avec deux autres personnes par un homme de l'ombre afin qu'ils prennent en otage la famille d'un comptable de General Motors, pour qu'il puisse leur donner un document important.

Depuis son retour au cinéma en 2017, Steven Soderbergh s'affranchit du côté box-office, quitte à avoir des petits budgets, des contraintes techniques ou de travailler avec des plateformes. Après une collaboration avec Netflix, il travaille désormais pour HBO Max, avec pour le moment quatre films au compteur (incluant le futur Magic Mike), dont trois tournés durant la pandémie, c'est dire la productivité toujours aussi folle du réalisateur.

Mais là, pour ce qui s'apparente à un polar des 50's, car c'est la décennie durant laquelle se déroule l'action, il semble avoir eu les yeux plus gros que le ventre, notamment dans la technique qui me dérange beaucoup. En effet, le film a été tourné en numérique, mais Soderbergh a donné à l'image un aspect fisheye qui me dérange énormément, totalement inappropriée au genre, à l'époque, et à l'histoire même. Alors oui, c'est toujours virtuose dans la mise en scène, mais jamais on ne croit être dans les années 1950, les acteurs semblent aussi trop modernes comme Don Cheadle et Benicio Del Toro, et une lumière qui tire constamment vers le sombre. Nous sommes loin de l'utilisation du numérique comme Michael Mann avec Public Enemies...

Mais tout n'est pas à jeter, car si l'intrigue est plus complexe que mon résumé, on voit que Soderbergh est un excellent directeur d'acteurs, notamment les scènes avec Ray Liotta et Matt Damon qui sont très fortes, et marquent de leur présence les quelques minutes où ils apparaissent. En fin de compte, j'aurais préféré, à l'instar de Claude Lelouch justement, quand le réalisateur travaille dans de plus petits sujets, ou alors que la contrainte crée l'imagination. Car là, c'est un rêve de cinéphile de réaliser un polar, mais quand on voit que lui-même a des réserves sur son propre film (notamment l'utilisation du fisheye et le fait qu'il ait du recadrer une image à l'origine en Cinemascope), il y a de quoi être légèrement déçu.