• Revu en juillet 2014 :
Film OVNI dans la filmographie de Michael Bay qui s'inspire de faits réels dramatiques - des bodybuildeurs kidnappant et tuant - pour en faire une comédie noire succulente. S'il change des détails pour le plaisir de la fiction, la débilité des criminels y est par contre telle quelle et effarante tant cela paraît incroyable. De ce fait, ils sont tellement cons qu'on ne s'y attache pas vraiment, mais on suit de loin leurs idées impensables. Bay s'amuse de cette histoire sordide tout en profilant la quête du rêve américain. Sa réalisation bien clinquante et dynamique, sans subtilités et plus grande que nature pour ce style de film, y fait d'ailleurs totalement écho et ajoute un certain cachet. Mark Wahlberg étonne de justesse, Dwayne Johnson est fantastique, et Anthony Mackie amène un petit plus, tout comme Tony Shalhoub. Des gros bras pas très finauds qui font que cette histoire folle semble aller parfois un peu loin dans l'exagération mais, eh, c'est ce qui c'est vraiment passé.

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• Critique du 25 septembre 2013 :
On les a vus venir de loin les sceptiques. Michael Bay, alias "Monsieur Explosions", le réalisateur connu pour ses blockbusters décérébrés, mais sacrément musclés, et surtout la franchise cinématographique Transformers, décriée par une belle frange d’autoproclamés cinéphiles, qui décide de revenir à un budget minime de 26 millions de dollars - son plus petit depuis Bad Boys, son premier film - et une histoire à échelle humaine ? Presque impensable de la part de celui qui avait pris l'habitude de détruire des sets de plus en plus gros et s'octroyait constamment les services des équipes d'effets spéciaux les plus pointues depuis lors. Pourtant, avec une intégrité exemplaire (Bay, Wahlberg et Johnson ayant renoncé à leurs salaires), le metteur en scène tyrannique nous livre un long-métrage percutant, parfaitement maîtrisé, dans lequel les séquences détonantes sont remplacées par des masses de muscles toutes aussi explosives.

No Pain No Gain est donc un film honnête, né du pur désir de Michael Bay de retranscrire cette histoire à l'écran, depuis plus d'une décennie déjà. L'histoire originale ? Un groupe de culturistes en ont soudainement marre de vivre comme des guignols alors qu'ils se trouvent physiquement supérieurs. Ils s'improvisent alors criminels et échafaudent donc des plans du dimanche pour kidnapper et faire cracher le blé de gens fortunés. Dans le but de pouvoir approcher du rêve américain, ils n'hésiteront pas à torturer et tuer, pensant pouvoir se tirer d'affaire en suivant les combines de films. Sur cette pseudo-critique américaine - les gars sont super musclés, mais toujours pas assez, et veulent toujours plus d'argent - on retombe, en quelques sortes, dans un carcan similaire à celui de Spring Breakers, à cela près que Bay a une histoire à raconter et un point de vue à (im)poser. S'il s'était agi d'un scénario original, tout le monde l'aurait trouvé exagérément ridicule, trop fou pour être vrai. Ce qui montre bien que la fiction est parfois bien plus proche de la réalité qu'on ne le pense. Le fait que No Pain No Gain soit adapté d'un vrai fait divers joue clairement en sa faveur puisqu'on questionne alors beaucoup moins l'histoire sur ses improbabilités. Et si vous trouvez les évènements du film tordus, sachez que plusieurs points ont été altérés, et adoucis (!) par rapport à la réalité.

Pareillement, sans doute de part la présence de Michael Bay en réalisateur, les scénaristes ont modifié le déroulement de certaines scènes et ajoutés quelques nouveaux éléments fictionnels. En dépit d'une histoire sinistre, le long-métrage est extrêmement orienté sur le comique, qui revient incessamment par l'emploi d'un humour érotique homosexuel - gadgets, sous-entendus, comportements - bien trop prépondérant et parfois juste étrange au sein du film. Si la réalité était déjà pas mal pimentée, l'ajout de passages tout aussi déjantés dans la simple optique de rester dans la fiction paraît par moment dispensable. Néanmoins, afin de fluidifier le film, les scénaristes ont eu la bonne idée de réduire le gang à un trio principal, mélangeant alors plusieurs personnalités dans leurs personnages. Et si l'alchimie entre les trois fonctionne si bien, et qu'ils se montrent tous aussi charismatiques les uns que les autres, c'est parce que le casting est excellent et s'amuse vraiment sur le plateau. Mark Wahlberg m'a vraiment étonné, il donne vraiment vie à son personnage, alternant très bien entre le rêveur un peu naïf et le psychopathe refoulé. Ce registre est parfait pour lui. À ses côtés, Dwayne Johnson qui est franchement un excellent acteur, pas seulement un tas de muscles. Il endosse des rôles plus ou moins variés en offrant toujours un jeu de qualité, et les mimiques de son personnage un peu simplet et ne jurant plus que par Dieu renvoient totalement à sa prestation dans Southland Tales - que j'avais adorée. Dernière roue du carrosse : Anthony Mackie, complètement déjanté, et obsédé par la matière grasse alors qu'il cherche, paradoxalement, à totalement la perdre. Il apporte également une bonne partie des répliques drôles.

Ces trois acteurs créent donc un cocktail explosif, où leurs caractères hauts en couleurs et bien distincts permettent de mettre en branle de nombreuses situations délicieusement farfelues. On peut aussi mentionner la présence de Tony Shalhoub, campant la première victime et transmettant à merveille l'attitude bourgeoise arrogante, ainsi que Ed Harris, dans le rôle du détective coriace. Tous ces personnages secondaires ont également des passages de développement, qui font que le spectateur devient finalement omniscient. Il se passe toujours quelque chose, privant donc le film d'accuser des temps morts, et sans que cela ne le rende non plus trop lourd. Les scènes se succèdent rapidement, le rythme est énergique sans être effréné ; un bon compromis qui nous permet de profiter autant de l'histoire que de l’œil aguerri de Bay pour balancer des séquences qui titillent la rétine, même en restant à échelle "humaine". Sa mise en scène est minutieuse, les cadrages millimétrés, tout en insérant quelques séquences à la GoPro qui nous immiscent carrément au cœur de l'action. La photographie est léchée comme jamais, la colorimétrie est pétillante, et le montage dynamique. Visuellement, c'est très professionnel et extrêmement bien torché. Disons que le cadre s'y prêtait puisque tout a été tourné à Miami. En complément, Steve Jablonsky signe une bande-son de textures électroniques et mélodies pianotées assez classique - ce n'est pas son meilleur travail - mais tout de même efficace. On sent qu'il s'est davantage inspiré de Cliff Martinez (Spring Breakers, Drive), surtout pour le thème principal, souvent utilisé lors de passages de réflexion/contemplation où tout l'enjeu dramatique vient alors se dessiner en filigrane des situations ridicules.

Dans un sens, en prenant essentiellement le point de vue des criminels, tout en adoptant un ton globalement léger, cela peut créer la polémique de les héroïser (deux ont quand même été condamnés à mort). Toute leur histoire est vraiment malsaine et, dans le cas du doute chez le spectateur, le film précise à nouveau qu'il s'agit toujours d'une histoire vraie lors des scènes les plus impensables. Ainsi, de nous mettre de leur côté (et d'en venir à souhaiter qu'ils s'en sortent malgré leurs atrocités) peut porter à controverse, mais il faut rester relatif, considérer l’œuvre de fiction comme telle. Et No Pain No Gain est franchement original dans sa façon de raconter tout cela, dans une optique assez singulière, et judicieusement connectée avec le thème du rêve américain. Habituellement, n'importe quel réalisateur aurait opté pour un Thriller Néo Noir, avec un style années 90 très appuyé, une enquête tortueuse, des personnalités torturées, et une dramaturgie exacerbée à en devenir dépressif sur le finale. Michael Bay a plutôt préféré exposer cela à sa façon, l'adapter à sa vision, pour livrer le message avec ses propres codes cinématographiques. C'est ce qui fait que son œuvre fonctionne si bien. Tous les éléments sont typiques de son "gros" cinéma habituel (acteurs bodybuildés, décor paradisiaque, luxure, belles nanas), et il sait les employer à bon escient pour bâtir l'histoire et transmettre le thème plus grave qui en ressort.

No Pain No Gain est finalement une œuvre très complète, où la forme fait constamment écho au fond. Dire qu'il s'agit du meilleur film de Michael Bay est trop facile. Je préfère laisser cette phrase toute faite à ceux qui pensent que cracher constamment sur le réalisateur leur attribue un certain cachet de bon goût. Il n'empêche que le Monsieur a su imposer son esthétique méticuleuse, toujours irréprochable visuellement, et chirurgical dans la construction de ses plans impressionnants. C'est un réel bonheur sur grand écran, reflétant véritablement le summum des instruments cinématographique dont il dispose. Néanmoins, au-delà de cet apparat visuel pimpant, dynamique et aguicheur, Michael Bay met en scène une histoire extrêmement sombre, tirée d'évènements vrais qui plus est, et bien éloignée des thèmes qu'il a l'habitude de traiter. Avec une dérision constante, gagnée au fil des longues années de latence du scénario, et qui permet d'apporter plusieurs lectures à son œuvre, Bay tacle ainsi les multiples strates du rêve américain en montrant jusqu'où ses personnages seraient prêts à aller pour le vivre, quitte à faire le sacrifice ultime.
AntoineRA
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le 25 sept. 2013

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