Il y a dans Moonlight un peu de la magie qui faisait le charme de Boyhood : ressentir l'épaisseur du temps qui passe.


Dans le chef d'oeuvre de Richard Linklater, c'étaient les acteurs eux-mêmes qui vieillissaient. Ici, le même personnage est joué par trois acteurs différents, à trois âges de la vie.


Le premier grand mérite du film est de rendre crédible les transformations physiques du personnage : plutôt gringalet dans les deux premiers épisodes, il se transforme en armoire à glace dans le troisième. Au premier abord, l'effet est déstabilisant, mais la qualité de jeu des différents acteurs parvient à installer une continuité psychologique parfaite, principalement sur la base de regards et d'expressions.


Ce miracle est rendu possible par l'exceptionnelle direction d'acteur du réalisateur Barry Jenkins. Sa caméra semble caresser les personnages avec tendresse et émotion : plusieurs scènes du film sont des bijoux de délicatesse et de justesse. La scène du restaurant, dans la dernière partie du film, est un magistral moment de cinéma, qui semble condenser l'essence d'une vie dans un espace somme toute quelconque, par la seule grâce de la mise en scène.


Lorsqu'on a dit tout cela, le fait que le personnage principal du film soit homosexuel semble à la fois accessoire (le film est avant tout un portrait élégiaque et dépité) et fondamental (tout ce qui s'y passe ou presque renvoie à la condition de Noir gay dans un environnement défavorisé).


C'est beau, et c'est un des grands moments de cinéma de 2017.


http://www.christoblog.net/2017/02/moonlight.html

Christoblog
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les 10 meilleurs films de 2017

Créée

le 20 févr. 2017

Critique lue 581 fois

Christoblog

Écrit par

Critique lue 581 fois

D'autres avis sur Moonlight

Moonlight
mymp
8

Va, vis et deviens

Au clair de lune, les garçons noirs paraissent bleu, et dans les nuits orange aussi, quand ils marchent ou quand ils s’embrassent. C’est de là que vient, de là que bat le cœur de Moonlight, dans le...

Par

le 18 janv. 2017

180 j'aime

3

Moonlight
JérémyMahot
4

Un scénario lunaire

Moonlight, comme son personnage principal, a du mal à se situer : le film de Barry Jenkins se présente d'abord comme un témoignage social, à vif, caméra à l'épaule dans le style des frères Dardenne,...

le 11 févr. 2017

62 j'aime

Moonlight
Plume231
3

La seule chose à retenir : la bourde la la landienne !!!

Les vannes de Jimmy Kimmel, les très nombreuses piques anti-Trump de la part de Kimmel et des différentes stars qui ont défilé sur scène, des noirs récompensés à profusion pour tenter de faire...

le 1 mars 2017

37 j'aime

5

Du même critique

Leto
Christoblog
4

Un film sûr de sa force, et un peu creux.

Leto est un bel objet, qui plaira aux esthètes, aux journalistes de rock, aux défenseurs de Kirill Serebrennikov (le réalisateur du film, persécuté par le pouvoir russe), aux fans d'Iggy Pop, aux...

le 7 déc. 2018

38 j'aime

8

Notre petite sœur
Christoblog
10

Magnifique.

Quel autre cinéaste qu'Hirokazu Kore-Eda est aujourd'hui capable de filmer la beauté du monde ? Depuis que Malick est parti en vrille dans sa trilogie émoliente, la réponse est claire :...

le 28 oct. 2015

31 j'aime

3

Doubles Vies
Christoblog
2

Entre-soi chichiteux

Le dernier Olivier Assayas mêle de façon assez grossière une réflexion lourdingue (et déjà datée) sur la révolution numérique et des histoires quelconques de coucheries entre bobos. Sur le premier...

le 18 janv. 2019

30 j'aime

2