Bureaucratie assassine et toute-puissante

Un brave charpentier sexagénaire ne peut plus travailler à cause d’une cardiopathie, tout en étant interdit d’indemnité par les services sociaux Anglais. Dans un monde kafkaïen mais malheureusement quotidien pour bien des demandeurs d’aides sociales, il nous invite dans sa descente aux enfers, ou plutôt dans les crevasses informatisées et réglementaires d’une administration absurde, assassine et toute-puissante. Le film devient d’autant plus poignant, cruel et insupportable lorsque notre Daniel Blake lie son sort à celui d’une petite mère-courage et affamée qui tente également de ne pas se noyer tout en portant ses deux enfants, entre la spirale funeste des banques alimentaires et des besognes avilissantes.
Malgré les excès clairement engagés de Ken Loach, destinés à faire passer le message, ce drame social accuse une société qui cache hypocritement, derrière sa bonne conscience de politique sociale, son processus d’exclusion et de broyage organisé des pauvres, méthodiquement découragés par l’absurde, la nécessité, l’humiliation, l’infantilisation et la perspective d’incohérence infinie à venir. Ce magnifique et effroyable portrait d’une société soviétisée par l’économie illustre, par cet intimiste, touchant et terrifiant drame social, l’un des instruments de paupérisation volontaire qu’elle véhicule en organisant méthodiquement l’aberration institutionnalisée.

etiosoko
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le 4 avr. 2017

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