Et pour quelques pastèques de plus

Mon titre de critique est un petit hommage au western, car on est ici dans une sorte de western moderne, sans chevaux, mais avec de grosses bagnoles et des fusils. J'aime particulièrement ce genre de film des années 70, avec un ton très spécifique, et en plus il me rappelle plein de souvenirs d'ado du temps où en 1974, j'étais allé le voir comme tous les films de Charles Bronson, je n'en ratais aucun de cette période.
Délaissant provisoirement le dégommage de voyous de Un justicier dans la ville, Charly incarne cette fois un paisible agriculteur qui se préoccupe du ramassage des pastèques de son exploitation (en anglais, des "water melons", grosse pastèque ovale à la peau zébrée verte), mais comme on l'emmerde, il se défend et fait le ménage au fusil de chasse ; une petite crapule locale (jouée par Paul Koslo) va indirectement lui mettre dans les jambes le redoutable tueur à gages Frank Renda incarné par Al Lettieri.
Comme on le voit, c'est une histoire simple mais bien écrite par Elmore Leonard, auteur de polars reconnu qui a été souvent appelé à Hollywood pour adapter ses romans ou écrire des scénarios originaux (aussi Joe Kidd pour Clint Eastwood) qu'il novélise ensuite. Dans cette histoire, il y a les pastèques, des ramasseurs mexicains et donc un petit arrière-fond social, mais rassurez-vous, c'est avant tout un polar d'action, mais moins nerveux qu'on pourrait croire, car Richard Fleischer ne succombe pas aux scènes d'action pléthoriques, il distille l'intrigue et pose doucement les choses, sans trop se précipiter, la tension monte en une sorte de crescendo pour culminer dans le règlement de compte final au coeur d'un massif boisé dans une belle baraque en rondins. Il livre une mise en scène très efficace et sans fioritures, notamment lors d'une scène de fusillade urbaine entre flics et truands assez intense, puis lors d'une poursuite entre le pick up de Majestyk et 2 bagnoles de truands, classique mais originale par son décor de massif montagneux ; Fleischer filme ainsi quelques beaux endroits accidentés du Colorado.
Bronson est fidèle à son image de cette époque : stoïque, nonchalant, parlant peu, l'air félin, bref totalement charismatique. Mais le point fort du film, c'est Al Lettieri, sublime bad guy au look d'Italo-américain qui avec la moustache pouvait jouer aussi les Latinos. J'adore cet acteur qui s'est fait surtout connaitre dans le Parrain (rôle de Sollozzo) et qui a enchainé ensuite plusieurs rôles de méchants dans des films comme Guet-apens de Peckinpah où il courait après Steve McQueen, Don Angelo est mort, sorte de fausse imitation du Parrain, et aussi Un silencieux au bout du canon où il était un gros baron de la drogue qui tentait d'intimider John Wayne. Doté d'une vraie gueule de méchant et d'un sacré gabarit, sa carrière a été brutalement stoppée par son décès en 1975, d'où le fait qu'il reste méconnu du grand public. Dans Mister Majestyk, c'est un tueur à gages, entété et à la tchache ironique qui a décidé de se payer Majestyk juste parce qu'il s'est senti humilié par ce brave agriculteur.
L'affrontement entre Bronson et Lettieri est vraiment réjouissant et vaut son pesant de pastèques, il ne vaut presque que pour ça, même s'il s'accompagne de tout ce que j'ai décrit plus haut, avec quelques scènes brutales ; en plus on a le plaisir de revoir la superbe Linda Cristal, la beauté latina de l'époque, un peu la Salma Hayek des années 60 et 70. Un bon film donc, bien emballé par Fleischer, sans prétention, juste pour le fun et la détente.


A noter que j'ai toujours trouvé l'affiche française assez quelconque, je préfère l'affiche américaine qui a plus de gueule et qui correspond mieux au contenu du film.
https://homepopcorn.fr/wp-content/uploads/2016/10/mr-majestyk-669x1024.jpg

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le 18 nov. 2021

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