Un peu plus de huit mois après Michael Cimino, God Bless America nous avons enfin la chance de voir la version complète du film de Jean-Baptiste Thoret sur Michael Cimino.
La première "version" diffusés sur les petits écran de Arte donnait déjà un très bon avant-goût de ce qu'on allait découvrir. Une forme de documentaire biographique qui ne va pas donner l'histoire de l'homme ou de ses films dans une récitation académique mais qui va plutôt donner le ton, la sensation que procure les films de Cimino.


Et de ce fait l'entretien fait en 2010 entre Cimino et Thoret sur la route inverse de la conquête de l'Ouest est la partie du documentaire qui m'a le plus marqué. Cette voix d'outre tombe, qui exprime avec une mélancholie plus qu'audible les regrets, les erreurs et les envies qui n'arriveront jamais de sa vie de cinéaste est ce qui m'a le plus bouleversé. Il y aurai énormément de citation à ressortir qui rien que d'y penser me resserre déjà un peu le cœur. Mais la plus parlante est, je pense, celle où il évoque la volonté qu'il avait de faire une fresque, que ses films puissent avoir une continuité logique sur le portrait globale des Etats-Unis.
Mais que cela ne s'est jamais fait.


Et c'est justement toute cette essence de passé disparus, d'un rêve de retour en arrière impossible qui touche le film et que touchais déjà la version raccourcie. Mais ce qu'il y en plus ici, c'est la très grande première partie et les entretiens disséminés ensuite durant le reste du film des habitants de Mingo Junction, la ville où à été tourné Voyage au bout de l'enfer.
Cette communauté de cette ville maintenant morte, qui parle du passé de cette ville, de leurs vies avant et après le film et qui finalement en parlant d'eux parle de Cimino. Ils parlent de cette mélancholie dans ses films, d'une époque dur, complexe, peut-être pas d'or mais qu'ils regrettent, que ce mirage, ce rêve que dépeignait Cimino dans ses films était vrai.
Le passage sur l'ami de Tommy Fitzgerald qui était présent dans le film, sur ce vieux vétéran du Vietnam qui parle de son expérience après avoir vu le film, de ce qu'à vécue Oliver Stone et de ce qu'il pense justement du point de vue de Cimino, de son ami Stanley White. Le film brille quand il s'éloigne du réalisateur pour parler du réel, de ses gens où quasiment rien ne les relies et pourtant tous convergent vers ce réalisateur.


Le défaut que je ressortirai serais peut-être les intervenants moins personnelles, moins relié humainement à Cimino. Je pense à l'historien du cinéma où j'ai oublié son nom, qui n'est pas inintéressant mais qui n'a pas sa place je trouve dans ce film, et Tarantino qui ne dit rien qui vaille la peine d'être retenu. Ses interventions n'ont aucun intérêt.


Mais reste un documentaire sur un réalisateur puissant. Puissant par son approche, une approche de côté qui va regarder tout ce qui gravite autour du réalisateur pour, d'une façon assez étrange et néanmoins fascinante, parler du cœur de ses œuvre et de l'homme derrière.
Le mirage qui titre le film est à la fois celle du passé que l'on décrit irréel qu'il s'efforçait pourtant de représenter, en même temps celui qui a été vécu par la communauté de Mingo Junction qui s'est effacé depuis longtemps. Mais surtout celui du réalisateur lui même. Qui n'a jamais eu sa place, toujours trop en avance et en même temps trop en retard sur son époque. J'espère que cela donnera un regard nouveau sur ses films qui ont été à leurs époques souvent mal compris, des fragments du mirage qu'était le rêve inachevé de Cimino.

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le 25 janv. 2022

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