A Montréal, trois femmes d'origine libanaise s'apprêtent à fêter Noël. La fille, la mère et la grand-mère. La mère reçoit par la poste un énorme colis. Dedans, toute la correspondance qu'elle avait envoyée à sa meilleure amie d'enfance, dont elle apprend en même temps le décès. Correspondance envoyée de 1982 à 1988 pendant la guerre du Liban. En s'y plongeant, au départ contre l'avis de sa mère et de sa grand-mère, la fille va découvrir le passé de sa famille, et toutes les tragédies, personnelles et historiques, liées à cette guerre qu'elle n'a pas connue, notamment la mort de son grand-père et du frère de sa mère, mort à l'âge de 8 ans dans une voiture piégée destinée à son père. Le nouveau film de Khalil Joreige et Joana Hadjithomas, deux cinéastes que j'adore littéralement est magnifique et fascinant à plusieurs niveaux. Déjà parce qu'il est inspiré de la correspondance privée de Joanne, même si librement, et à travers ce film, c'est également son enfance qu'elle nous offre de découvrir. Je ne sais pas ce qui est vrai de ce qui est inventé pour le film, et à la limite je ne veux pas le savoir, c'est l'oeuvre que je juge, mais savoir que tous ces cahiers ouverts sous nos yeux ont existé réellement me bouleverse et me donnent un témoignage qui transcende le film en le rendant réel, palpable. Le film est saisissant aussi car c'est un film composite, expérimental dans sa forme puisque la narration va littéralement naitre de la matière première fournie par ces carnets qui vont se mettre à vivre et ouvrir des dizaines de tiroirs, occasionnant des flashes back multiples et autant de récit, qui vont s'associer dans une grande spirale, et sans jamais la moindre confusion malgré la profusion, et dont la juxtaposition de l'ensemble crée l'oeuvre. Ce qu'il y a de fort, c'est que c'est un film expérimental ou presque dans sa construction, et que ça ne l'empêche pas d'être aussi un film incroyablement émouvant (la larme à l'oeil n'est jamais loin) ainsi qu'un des films les plus précis et les plus troublants qu'on puisse trouver sur la guerre du Liban puisqu'il nous permet d'en saisir véritablement les tragédies.

FrankyFockers
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le 26 janv. 2022

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FrankyFockers

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