Les bons sentiments, est-il besoin de le répéter, passent plutôt mal au cinéma. Et le cynisme est plutôt dans l'air du temps. Mauvaises herbes, le deuxième long de Kheiron, est à contre-courant, c'est ce qui fait son charme avec son humour, parfois un peu limite, sa bienveillance et son énergie. Le film n'est pas vraiment empreint de réalisme mais sa naïveté même est l'un de ses principaux atouts, avec son personnage d'éducateur visiblement inspiré par l'expérience de son acteur/réalisateur. Il y a quelque chose de persan dans la façon qu'il a de raconter la vie en société et les ressources humaines, un peu à la manière de Marjane Satrapi dans ses albums (Persepolis). Les flashbacks dramatiques qui racontent l'enfance meurtrie du héros du film et qui agissent comme sous-intrigue, ont paradoxalement moins d'impact car trop lourds dans leur signification, et visant cette fois le réalisme, se révélant en porte à faux avec le récit principal. Même remarque avec l'histoire inutile avec le flic marron, dans la dernière partie du long-métrage. En dépit de ces bémols, Mauvaise herbes sonne juste et se révèle généreux pour sa plus grande part, moins dans sa vision de la bonne éducation, un peu candide, que dans ses rapports humains et humanistes : entre les élèves et l'éducateur, entre ce dernière et sa "mère" (une Deneuve débridée comme on l'aime) et enfin entre "personnes âgées" (Dussolier, toujours impeccable). Mauvaises herbes, pour ses côtés chaleureux, prodigues et philanthropes, nous ferait presque croire à la bonté intrinsèque de l'homme. On n'est pas dupe mais cela fait du bien.