La méthode de Brillante Mendoza est irrésistiblement efficace. Son cinéma semble filmé « en direct », pris sur le vif, non dirigé, très proche du documentaire. Faits de plans-séquences tournés au plus près des personnages que l’on suit dans le moindre de leurs déplacements (ce pourrait presque être une narration « en temps réel »), son cinéma est formidable d’immersion.


Le film est donc déjà très frappant pour sa mise en scène – même si celle-ci n’est pas nouvelle ou renouvelée, elle n’en est pas moins l’une des plus saisissantes qui soient. Mais il est aussi frappant par le portrait terrible qu’il dresse de son pays : une société très pauvre où la corruption est généralisée (la découverte de l’étendue de la corruption est d’ailleurs l’un des plus gros chocs ménagés par le scénario du film, implacable), où tous les rapports sont gangrenés par l’argent (le grand sujet de Mendoza). La vie de Ma’Rosa, l’héroïne du film, semble un parcours du combattant permanent – le suivre sur une journée est déjà épuisant pour le spectateur… Même le climat est hostile, puisque tout le film se déroule sous une tempête de pluie.


Toute la misère du monde semble donc concentrée dans ce film, presque comme s’il en faisait le catalogue. Ça pourrait paraître « trop », ça pourrait paraître racoleur comme si Mendoza faisait un spectacle de la misère de son pays… Mais non : sa mise en scène est tellement vive et immersive, que pendant le film on ne se pose aucune question tant on est happé par ce qu’il se passe, tant on y croit. C’est par ces accumulations folles que Mendoza produit cette impression si forte de réel. Et plus cette impression est forte, plus sa dénonciation est efficace.


« Ma’Rosa » est donc un film à qui l’excès réussit. Bonne nouvelle : Brillante Mendoza est bel et bien de retour, et n’a rien perdu de sa vigueur.


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Ertemel
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le 3 déc. 2016

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Ertemel

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