RETROSPECTIVE X-MEN (9/10) : Logan

2013, avant même que The Wolverine ne sorte, la Fox et Mangold planchent déjà sur un nouveau script destiné à clore la trilogie initiée avec X-Men Origins Wolverine.

Mangold et Jackman, amis depuis près de vingt ans, ont des tas d’idées derrière la tête mais surtout : l’ambition ici est de faire un film vraiment différent.

Ils vont échanger sur le sujet au fil des mois qui suivent piochant dans des sources d’inspirations éloignées des récits typiques de super-héros, comme The Wrestler, Unforgiven, Mangold déclarant pensé à une sorte de « Little Miss Sunshine sanglant ».

Le studio de son coté a d’autres soucis à régler car si coté vitrine les projets se cumulent, à l’arrière boutique il faut parvenir à gérer la production simultanée d’Apocalypse, le développement de ce qui deviendra Logan, et le sempiternel projet d’adaptation de la saga Dark Phoenix par Singer qui deviendra… Dark Phoenix… par Kinberg.


Jackman n’étant contractuellement plus lié à la franchise, son retour dépend entièrement de sa satisfaction à l’égard du scénario retenu. Début 2015, Patrick Stewart déclare être en pourparlers pour ce dernier opus sur Wolverine. Le scénario lui prévoit de rôle et une personnalité aux antipodes de ce qu’on a connu de Charles Xavier, idem pour Wolverine d’ailleurs.


Fin 2015 Mark Millar rejoint le banc des scribes pour peaufiner le scénario et confirme par la même occasion que ce dernier sera librement inspiré d’une de ses propres oeuvres : Old Man Logan, version alternative du personnage publiée à partir de 2008. Le scénario prévoit un film R-Rated et est finalisé courant 2016, dans le même temps le casting se précise avec entre autres Stephen Merchant, Boyd Holbrook mais surtout Dafne Keen, choisie pour interpréter X23 aka Laura Kinney. Créée pour la série iconique X-Men Evolution en 2003, Laura avait plu et bénéficiait l’année suivante de sa première publication en comics. Depuis le personnage est apparu dans divers médias, mais c’est la première fois sur grand écran.


À sa sortie, le film est acclamé tant par la critique que par le public, décrit comme l’anti-film de super-héros, s’inscrivant dans la très petite lignée des films du genre ayant embrassé une approche cinématographiquement plus ambitieuse, à la façon d’un The Dark Knight qui puisait du coté de Michael Mann ou Tony Scott. Une pelletée de louanges donc, mais que racontait déjà ce Logan ?


En 2029, ce dernier mène une vie compliquée. Quand Wolverine ne tente pas de gagner son pain en tant que chauffeur de limousine sans se faire agresser, il effectue la garde alternée du Professeur Xavier, grandement affaibli, drogué et désemparé à une époque où les mutants ont pour la majorité disparus, avec l’aide de Caliban, un mutant rescapé. Logan lui-même n’est d’ailleurs plus du tout au sommet de sa forme. Âgé, toussotant, fatigué et malade, le mutant immortel peine littéralement à se régénérer de ses blessures qui s’accumulent. Une ultime porte de secours le maintient quelque peu en activité : la perspective d’une vie isolée sur un bateau avec Charles, loin d’un monde en pilote automatique et plus du tout concerné par la question des mutants. C’était sans compter sur leur rencontre avec Laura, une orpheline qui semble attirer énormément de convoitises…


J’avais été grandement satisfait à sa sortie. Après un premier opus à ranger sur l’étagère des pires films de super jamais réalisés, et un second aux intentions louables mais à l’exécution extrêmement inégale, Wolverine bénéficiait enfin d’un beau traitement, d’un bel arc. Le film n’était pas sans défauts, s’essoufflant selon moi à quelques reprises, mais c’était franchement le maximum que je pouvait sincèrement reprocher au film à brûle pourpoint.


Après l’avoir revu une seconde fois ? Franchement ça n’a pas trop changé : différent, violent, dramatique, dépaysant, beau… Les adjectifs ne manquent pas pour décrire ce film.

Logan est un chouette road movie, une belle fenêtre sur une famille de fortune torturée, et parvient même à glisser en sous-texte une critique d’un monde qui part malgré lui à la dérive faute de réels objectifs vibrants, sans jamais être rentre-dedans.


MAIS.


Il y a des choses qui me gênent.


Elles ne sont pas nombreuses, mais elles malheureusement sont là et tâchent un peu mon ressenti : un antagoniste en demi-teinte et une organisation dont la menace est difficile à cerner, une surprise décevante malgré la prouesse technique aux 3/4 du film, des essoufflements qui gagnent en ampleur à mesure que le récit avance, une BO qui manque de caractère et un dernier tiers qui réussi l’exploit d’être tristement conventionnel bien que les derniers instants soient effectivement émotionnels.


Autre reproche, purement de fond : en cherchant presque par obstination à rompre avec les codes du genre, avec la franchise et même avec sa propre trilogie, Logan effectue malgré lui une pirouette qui le dessert.

Rupture avec la franchise ou non, c’est ce perso qu’on a découvert dans le 1er X-Men sorti en 2000 et dont on découvre ici les ultimes péripéties. Sauf que le film fait le choix de sevrer les liens au maximum, se concentrant sur les besoins de son propre récit. Pas d’univers à exploiter, pas de background à apporter, ça n’est pas de ça dont l’histoire a besoin et c’est fondamentalement compréhensible. Sauf qu’on parle tout de même de Wolverine, des X-Men. Le film est plus occupé à rendre hommage aux classiques qui l’ont inspirés qu’à embrasser ce pour quoi il existe : nous plonger dans son univers.

On a une expérience effectivement très intimiste, mais quasi formaliste, presque forcée, afin que l’intrigue se justifie.

Bien que ça ne soit pas aussi appuyé ici, le film m’a, à certains égards, fait penser à The Joker : si peu d’éléments sont conservés afin de justifier les titres utilisés, et on va feindre de faire confiance aux spectateurs pour tout le reste, soit pour meubler, soit pour carrément l’imaginer. Si on les retirait, il nous resterait des films ostensiblement creux, reposant sur une quête aux hommages dénués d’histoires. Je pourrais presque partir sur un long monologue un peu néfaste sur le caractère quasi-pervers de ce genre d’approche qui voudrait, à force de vouloir proposer « du vrai cinéma » ou « quelque chose qui change », que l’on finisse par perdre de vue ce pour quoi le vrai cinéma existe. Est-ce une course à celui qui rendra le mieux hommage aux plus grands, où à celui qui saura le mieux en maitriser les codes pour se les réapproprier ?

Selon moi c’est ce qui distinguerait un TDK d’un Logan. L’un est un film de super-héros qui s’assume en tant que tel tout en embrassant ses sources d’inspirations, à l’inverse de Logan qui me donne parfois la sensation d’avoir honte d’être un film de super-héros.


Toujours est-il que ce Logan demeure solide, survolant allègrement les deux opus précédents et la très large majorité des films de la franchise.

Chernobill
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le 14 juin 2022

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