Le fond de la banane

C'est dur de parler d'un film tel que Les Tuche, tout en restant objectif, et surtout en évitant d'avoir ce discours de connard prétentieux arborant foulard et raie sur le côté, utilisant beaucoup trop le mot "mainstream" chaque jour, et premier fan incontesté de Xavier Dolan et Terrence Malick. Les Tuche, c'est con, mais c'est assumé. Et c'est bel et bien ce qui faut se dire pour aborder ce film. Malheureusement, faute avouée pas à moitié pardonnée.

Mon déplacement dans les salles obscures pour Les Tuche 3 s'est déroulé en plusieurs parties :

-Choc et déni : C'est ce qui s'est passé lorsqu'on m'a annoncé que ma prochaine sortie ciné entre amis serait pour l'élection de Jeff Tuche à l'Elysée. Je refuse, je me bats, puis je réalise que ce sont les mêmes amis qui m'ont un jour dit, entre autres : "The Dark Knignt et Iron Man, franchement pas de différence", "Dunkerque, t'es serieux ? Tu vas dans la file d'attente à la boucherie de chez Carrouf, tu verras c'est pareil", ou encore "Star Wars 8, franchement il est cool". A ce stade, j'ai compris que si je voulais aller au ciné avec mes copains, il fallait bien accepter de se rendre.

-Douleur et culpabilité : "16 euros s'il vous plait, salle 3". Qui provoquera ensuite une petite colère aussi.

-Marchandage : "Mais les gars, il est pas trop tard on peut gruger, regardez salle 2 y'a The Shape Of Water, ça à l'air cool, c'est l'histoire de...". Ca n'a pas fonctionné. Forcément.

-Dépression et douleur : La phase la plus longue. Parce qu'elle dure quasiment une heure. De la présentation de ce qu'on décrit comme "La famille française moyenne" à l'élection totalement débile de Jeff Tuche, tout y est. On nous ressert les memes blagues mal réchauffées, les mêmes personnages toujours aussi inutiles (cette fois çi Donald Tuche alias Coin Coin reussit même l'exploit d'être encore moins intéressant que dans les deux premiers volets). Les vannes ne fonctionnent plus, comme le passage gênant où les tuches se rendent à l'Elysée en Nevada, moment où on se rend compte que les scénaristes ont foutu le camp depuis bien longtemps. Comme on pourrait s'en douter, on va suivre Jeff Tuche en
slip/peignoir/banane/claquettes/chaussettes à l'Elysée, en train de tondre le jardin de l'Elysée, qui mène une grève à l'Elysée et tout un tas d'autre trucs que "Le français moyen" fait apparement (pas à l'Elysée bien sur, enfin c'est le principe du film, enfin vous m'avez compris).

-Reconstruction : Si on peut appeler ça comme ça. Intervient au moment précis où, permettez moi de citer Tuche Daddy : " EH LE REQUIN MARTEAU Y MANGE DES CLOUS MOUAHHAH". C'est le fou rire nerveux, mais pas moins libérateur.

-Acceptation : Comme après un discours patriote de François Hollande, je me sens plus boosté que jamais. Ma fierté d'être un français moyen, un Tuche, est incomparable. Et j'me suis délesté de 16 balles. Tout va bien. Le temps d'appeler mon kebabier préféré, lui commander une grande frite sauce samouraï, et rentrer me mettre dans mon canapé, louer Podium, Le Boulet et Fatal en VOD à 3,99 euros. Et demain, bien évidemment, c'est grève.

Si je devais conclure rapidement, je dirai que personne n'est à l'abri d'un jour cautionner ce type de production, parce qu'aujourd'hui c'est tout ce que le cinéma français a à nous proposer, entre la comédie sur le racisme avec Clavier et celle sur les Ch'tis avec Boon. Le fait que ce genre de film fasse un tabac reflète parfaitement bien la déchéance du genre en France. Quand on pense qu'il y a quelques dizaines d'années, on pouvait aller se marrer devant Villerret, Coluche ou Pierre Richard au ciné.. Et le pire, c'est que je suis sûr que spectateur conquis de ce genre de dégeulis sur grand écran, me demanderait ou est la différence entre les Tuche et les films de ces derniers.

CA PIK, CA PIK, CA PIK TELLEMENT FORT QUE T'AS LES YEUX QUI PLEURENT ET QUI PIK QUI PIK. Oui, ça pique.