Très tôt dans l’intrigue, l’homme du couple d’amoureux meurt. De cause inconnue, et les circonstances sont assez étranges.

Il est subrepticement, littéralement « emmené » par La Mort elle-même, avec son look de curé de province acariâtre, qui va le kidnapper et l’emporter dans son impénétrable forteresse.

Mais que venait faire la mort dans ce bled paumé ? Pourquoi s’enfermer derrière un mur ?

C’est une métaphore me direz-vous ? Oui, mais dans ce cas pourquoi construire le mur seulement maintenant ? Ils allaient où les morts précédents ? Étaient-ils gérés par le prédécesseur de La Mort ? Y-a-t’il plusieurs faucheuses ? S’agit-il de fonctionnaires divins, ici clairement subordonnés au tout-puissant ? Hélas, on ne le saura jamais.

Et surtout, « La Mort » n’est pas une cause de décès en soi, c’est une cause de décès quelconque qui provoque la mort. Alors, il est mort de quoi au final ce jeune homme pourtant en bonne santé ? On ne le saura pas non plus.

Ce n’est pas pour rien que le titre anglophone est Destiny. La thématique n’est pas vraiment celle de la lutte entre l’amour et la mort, plutôt celle d’un fatalisme chiant et déprimant. Concernant le coup des trois bougies, où l’héroïne a trois chances de sauver l’homme de trois couples différents de par le monde, le jeu n’en vaut pas la chandelle.

Le destin étant clairement établi comme inéluctable, donc en quoi l’amante éplorée avait-elle la moindre chance de changer quoi que ce soit ? Les couples des trois histoires sont incarnés par les mêmes acteurs, mais ce sont des personnages différents. Alors comment peut-elle influencer quoi que ce soit si elle ne communique même pas avec eux ?

C’est comme si vous aviez un patient malade d’un cancer généralisé en phase terminale, et que La Mort allait trouver un médecin, si brillant soit-il, en lui disant : « Je te laisse une chance de le sauver ! ». Soit la mort est complètement conne, soit c’est une grosse sadique.

Je n’ai pas pu m’empêcher de songer pendant tout le film qu’il ferait une brillante parodie, dommage que Mel Brooks n’y ait pas pensé. Il aurait peut-être pu insuffler à l’histoire ce qu’il fallait de malice et d’irrévérence, le film aurait tellement mieux marché…

Fritz Lang était un grand metteur en scène, mais parfois la niaiserie du message de ses films est bien embarrassante. Lui-même avait fini par reconnaitre que la morale de conte de fée du grand Metropolis ne saurait éveiller la conscience sociale. L’ensemble de son œuvre de Lang n’était pas non plus inepte puisqu’il a bien pondu M Le Maudit.

Et le message de ces trois lumières est illuminant. On y apprend que la mort est inéluctable et qu’un amant qui décède c’est triste. J’avoue que je n’aurais jamais deviné ça tout seul, et qui si on m’avait posé la question, j’aurais donné ma Lang au chat.

Quand on voit ce film, on a envie dire à La Mort : « Sors-toi les doigts du cul, révolte-toi, arrête de t’apitoyer comme une merde et de donner de faux espoirs aux gens. ».

A quoi ça rime d’humaniser la mort ?

A quoi riment ces histoires aléatoires ?

A quoi rime ce film au juste ?

C’est tout de même un beau film, mais c’est plus que problématique si d’un film qui traite de l‘amour, de l’adversité, du drame et de l’espoir on ne retienne que la vanité.

Lepidoptep
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le 19 nov. 2022

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Lepidoptep

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