Deux soeurs, deux femmes : Setsuko l'aînée incarne la tradition , elle est vaillante, résignée et porte le kimono, sa soeur Mariko 20 ans coquette, jupe et ballerines, clame haut et fort sa modernité, enfant gâtée qui se donne en spectacle : cris, pleurs, insultes à qui ne partage pas sa philosophie de la vie, tout entière centrée sur elle-même et le Carpe Diem qu'elle revendique.
A partir de simples événements du quotidien Ozu parvient à traiter de nombreux sujets relevant de la vie privée et publique sans doute passés sous silence dans le Japon de son époque, mais que lui aborde sans tabous, qu'il s'agisse de filiation, d'éducation, de respect de l'autre, de pardon ou de sacrifice, autant de pistes ouvertes à la réflexion, et c'est en définitive au spectateur qu'il appartiendra de porter un jugement.
Mais qu'est-ce que la modernité demande Setsuko qui à 35 ans s'est vue qualifiée de "vieux-jeu " par sa soeur cadette et qui rétorque avec la sagesse qui la caractérise : "la modernité, c'est ce qui ne vieillit pas avec le temps, car un jour la jupe est courte, le lendemain elle est longue".
Jusqu'à présent je n'avais vu Hideko Takamine que dans les films de Naruse où elle apparaissait toujours comme une jeune femme déterminée et volontaire mais lumineuse et douce, pour la première fois je la découvre en véritable petite peste, rôle assez inhabituel où elle surprend mais ne déchoit pas.
Un film où l'ambiance est passablement morbide : maladie, alcoolisme et mort brutale, mais dans lequel il règne pourtant une atmosphère parfois légère et déconcertante, véritable bouffée d'air frais.
Une histoire d'amour aussi où l'attente remplace la réalisation d'un amour retrouvé.
Une ambiance, grave ou légère, c'est selon, et deux portraits attachants de femmes dans le Japon des années 1950.