Ah que j’étais frustré à la fin de ce film ! (vous le sentez bien le procédé à suspense outrageux sur mon appréciation ?) Frustré d’avoir raté l’avant-première avec présence des acteurs, tout ça parce que la seule chose que l’on connaissait du film à ce moment-là était son affiche franchement ratée. Par-dessus ça, la bande annonce n’est pas franchement hilarante et reste assez loin du potentiel du film. En regardant les choses du bon côté, il est louable de ne pas utiliser les meilleurs gags du film dans celle-ci, mais il manque le petit truc en plus, le déclic qui pousse à aller le voir. Dommage, vraiment dommage d’être un peu à côté sur le plan marketing par rapport à d’autres qui le méritent bien moins.

Ceci étant une de mes raisons pour écrire ce qui va suivre sur le vif (avec entre autres une bonne humeur due au film), entamons sans plus tarder. Je suis allé voir ce film en grosse partie pour Chabat qui me semblait plus à son aise que dans Turf – j’en frissonne rien que d'écrire le titre – et je ne fus pas déçu, loin de là. On retrouve ici l’ex-Nul tel qu’on l’avait furtivement aperçu dans son Marsupilami, mais que l’on n’avait pas vu aussi en forme depuis un bout de temps. C’est simple, il est parfait dans ce rôle de quinqua déprimé que tout irrite, à commencer par sa femme. Là je sais que je vais partir dans tous les sens sur les acteurs et les personnages, mais tant pis : Sandrine Kiberlain a elle aussi un rôle taillé sur mesure.

Avant que je ne dise la même chose pour tout le monde, je tiens à féliciter le travail d’écriture, on sent que chacun a été bien travaillé pour coller à son acteur et inversement. Leurs particularités sont savoureuses, dans le cas de Kiberlain ce sera les ONG humanitaires, le tofu et une curieuse façon de s’exprimer. Les autres seront peut-être plus classiques, avec le personnage principal présenté comme un loser fini dès le début, et celle qui va tomber sous son charme à coup de piques bien senties.

Contrairement à un Ted qui s’éternisait de façon assez gênante sur de la guimauve pour lâcher quelques blagues scato de temps en autre, Les gamins est bien plus équilibré, piochant un peu partout le meilleur de l’humour actuel. Un peu de quiproquos et de situations dignes du théâtre de boulevard, un peu de cru « à l’américaine » sur les blagues de cul et les seconds rôles délirants, beaucoup d’humour frontal de la part de Boublil et Chabat, et par-dessus ça des passages « bonus » purement pour la blague, tels que « Ca c’est papy Marcel ! » (je vous laisse la surprise) et quelques caméos savoureux.

Un mélange qui pourrait sembler indigeste à la lecture mais qui se révèle très agréable et, surtout, naturel. On ne se sent pas parasité par des coups de coudes du film sur les gags, ni envahi par les références ou le déjà vu. On est en présence d’une comédie bien écrite, inventive et sincère, tout simplement.

Il pourra sembler facile de la surestimer en raison de la pauvreté actuelle de la comédie au cinéma (surtout française), mais je pense que c’est tout à fait le genre de film qui fait autant rire en le revoyant pour le faire découvrir, par exemple. L’inverse fut le cas avec Intouchables, qui m’a fortement déçu en le revoyant car pas si osé que ça une fois la surprise passée. De plus, l’illustre inconnu qu’était pour moi Anthony Marciano, apparemment complice de longue date de Max Boublil, étonne à la réalisation. Attention, je ne dis pas non plus qu’on tient le nouveau Tati, mais il y a de belles idées.

Encore une fois tout est question de contexte, il y a quelques décennies il n’aurait probablement pas eu droit à cette remarque, mais dans une période de crise pour l’humour français et de banalisation d’un humour TF1 torché sans passion, c’est bête à dire mais ça fait plaisir à voir. D’autres cinéastes ont plus de talent, d’autres humoristes vont plus loin dans leurs spectacles, mais je me restreint volontairement au domaine de la comédie dans lequel ce film représente une très bonne surprise.

Je trouve en général difficile de bien parler d'une comédie, par rapport à d'autres genres où la critique m'est plus naturelle, car sa réussite repose sur quelque chose de profondément personnel, le fait de rire ou non. Si l'on peut tout de même différencier considérer certaines comme (bien) meilleures que d'autres, il sera difficile de reprocher à quelqu'un de ne pas avoir ri à telle ou telle bonne comédie. L'un des grandes qualité que je trouve à l'écriture de ces Gamins est justement de ne pas tomber bassement dans la recherche du plus grand dénominateur commun, qui mène droit à un humour fade et aseptisé. On sent au contraire une certaine liberté qui colle bien avec le joyeux bordel régressif servant de moteur au scénario.

Pas d'auto-censure en vue, ils ont tout simplement pris des risques et beaucoup investi dans ce film. J'ai pensé plusieurs fois au long métrage de Riad Sattouf, Les beaux gosses, qui de la même façon assénait avec une belle assurance un humour que l'on voit trop rarement dans le cinéma français, au risque de se planter totalement. Ce ne fut pas vraiment le cas, mais sans passer le million d'entrées on peut difficilement parler de gros succès.

Les gamins ayant les atouts non négligeables que sont Chabat et Boublil, auxquels va très certainement s'ajouter un bouche-à-oreille favorable, il devrait mieux marcher et c'est tout ce que je lui souhaite. Cela faisait longtemps que je n'avais pas autant ri au cinéma, et si ça doit être le seul argument qui vous décide à le voir, peu importe, allez-y ! (et je vous assure que je n'ai pas d'actions sur ce film)
blazcowicz
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le 24 avr. 2013

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blazcowicz

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