La vulgarité en grammaire, l’incorruptibilité en règle de conduite, Les Flingueuses pousse le buddy movie dans ses retranchements les plus extrêmes et élabore un sacré moment de cinéma comique, soit la confrontation de deux électrons libres qui trouvent l’un dans l’autre l’occasion d’un concours de vacheries hautement jouissif et orchestré de main de maître. Car si Paul Feig dispose d’un savoir-faire, c’est bien sa capacité à rythmer ses intrigues volontiers parodiques en exacerbant les codes du genre investi. Ici, on pense volontiers à Training Day ou aux films mettant en scène le ghetto américain, sa justice expéditive, ses cartels dangereux ; seulement, Feig ne se contente pas de grossir le trait, non, il met en branle la machine de sorte à extraire de cet accélérateur de particules qu’est son édifice comique une énergie apte à créer du neuf, à extraire du duo suffisamment d’humanité et de spontanéité pour susciter chez son spectateur autant le rire que l’émotion la plus sincère.


Surtout, le cinéaste réussit à donner aux protagonistes féminins une importance véritable qui n’est pas celle d’une mode féministe consensuelle, mais qui sous-tend l’entièreté de sa structure dramatique. Et la grossièreté ambiante peut être lue dans cette même optique, comme la preuve d’une redistribution égalitaire des cartes : l’insulte, l’alcool, les armes à feu cessent d’être la propriété de la gent masculine pour se voir monopoliser et sublimer par la femme. Ainsi les hommes donnent l’impression d’une faiblesse naturelle, ils sont soit albinos soit traîtres soit lâches ; face à eux s’affirment deux femmes définies par un langage fleuri et surtout par une efficacité dans les responsabilités qui leur incombent. Deux rivales qui finissent par devenir amies, puis sœurs. Voilà défini l’esprit d’équipe comme communion dans la vulgarité et dans le respect mutuel.


Les Flingueuses s’affirme tel un acte de foi dans la grossièreté et offre au talent burlesque de Melissa McCarthy et Sandra Bullock une tribune en or où faire des étincelles. On en redemande.

Fêtons_le_cinéma
9

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Créée

le 24 déc. 2019

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