La révolution par la passion
Les Épices de la passion est un curieux film, à mi-chemin entre le soap sentimental teinté d’érotisme et la fresque familiale qui relate la fin d’un âge marqué par ses traditions et son...
le 14 juin 2020
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Les Épices de la passion est un curieux film, à mi-chemin entre le soap sentimental teinté d’érotisme et la fresque familiale qui relate la fin d’un âge marqué par ses traditions et son conservatisme. Pour articuler ces deux trajectoires, une actrice, révélation ici : Lumi Cavazos illumine l’écran par une passion dévorante qu’elle réussit à contenir puis détourner, à rejouer dans sa cuisine. Aussi les quelques séquences de préparation de repas s’avèrent-elles passionnantes et conjuguent l’art culinaire avec le sensualisme débridé. Quelques beaux plans furtifs, à l’instar du domaine familial en proie aux flammes ou une scène de bal intérieur au cours de laquelle la caméra accompagne avec fluidité ses protagonistes dans leurs mouvements, lorgnent du côté du poème et du symbole, rehaussent le goût d’un mets atypique mais doté de grossièretés et d’une écriture plutôt opportuniste qui recourt à moult ellipses pour non seulement accélérer le rythme mais aussi rendre prégnantes les évolutions politiques du pays.
C’est dire que l’amour-passion sert ici au réalisateur de prisme par lequel raconter la révolution mexicaine, que la libération du personnage principal, Tita, équivaut à celle des mœurs de son temps. À ce titre, les irruptions de la sœur devenue actrice de la révolution rappellent l’ancrage du domaine familial, a priori isolé, dans un pays en pleine mouvance intérieure, rappellent que lui aussi est concerné, microcosme qui rejoue en mode mineur – celui de la passion criminelle – les enjeux politiques. Néanmoins, nous reprocherons au long métrage un certain systématisme dans son recours à l’ellipse, qui casse la dynamique d’ensemble et accélère inutilement un récit qui finit par n’être composé que des grands moments, tel un best of de la vie au domaine familial avec coups de théâtre, baisers volés et nuits sans sommeil. Nous aurions aimé partager le morne quotidien de Tita, et en même temps porteur de tous les possibles, feu dont les braises manquent à tout moment de dévorer les cœurs ou d’emporter les êtres; nous aurions aimé ressentir davantage la jalousie qui la lie à son autre sœur ; en lieu et place, une grandiloquence qui paraît forcée et envahissante, assez proche du mélodrame lénifiant.
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le 14 juin 2020
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