Lorsqu'une œuvre nous a marqué, on est tout de suite attiré par le parcours de son réalisateur, et c'est ce qui m'a poussé à m'intéresser à Joel Crawford. C'est un réalisateur au parcours de beaucoup dans le monde du cinéma d'animation. Il qui a commencé à travailler pour les grands studios avec un court métrage lié à une franchise existante (Les Trolls Spéciale Fête), et a été invité à réaliser un premier long métrage faisant suite à une franchise (Les Croods 2 : Une nouvelle ère) avant de réaliser un chef d’œuvre absolue en donnant ses lettre de noblesse au Chat Potté avec la dernière quête. Avec les productions Disney, les suites et prolongements des univers cinématographiques ont souvent été synonyme de tâcheron. Ça a été notamment le cas avec la période des années Direct to DVD qui hante les esprits au point que, encore aujourd'hui, on fasse un devoir de mémoire à travers des vidéos démolissant en règle ces dits films que même le studio aux grandes oreilles doit avoir beaucoup de peine à défendre. Du côté de chez DreamWorks, la chose est beaucoup plus complexe. Les films étant construit comme des franchises et des univers dont chaque films en est un chapitre, l'opportunité de faire des suites est beaucoup moins risqué car pensé dans l'ADN même des films. D'une certaine manière, c'est une façon qu'a trouvé DreamWorks de se détacher de Disney et de revendiquer sa propre identité, ce qui explique la qualité nettement supérieur d'un Shrek 2 à celle d'un Frozen 2 ou d'un Bernard et Bianca au pays des kangourous. Il en vient une certaine hype lorsque l'on connait les capacités du réalisateur, que l'on voit qu'une suite tiré de franchise a été réalisé par ses soins. D'une part celui-ci a démontré que l'on pouvait rendre fascinant et tout public une suite d'un spin-off, mais aussi car il s'attaque à une franchise qui se révèlera être l'une des meilleurs que DreamWorks ait jamais inventé. C'est ainsi que j'ai rattrapé le premier film, que j'ai adoré le dit film, et que je m'avance pour me prendre une claque... que j'ai eu plaisir à recevoir.


Les personnages sont amenés à évoluer et à grandir avec les mêmes thématiques que dans le premier film (la confrontation entre innovation et tradition, entre indépendance et collectif, et obscurité et connaissance). Seulement, le film se veut plus comme un miroir du premier film qu'une redit. Là où la maison était montré comme un endroit sombre sans aventure à côté de l'extérieur qui est source d'émerveillement, dans une forme de dichotomie assez brutal, les lignes sont amené à devenir de plus en plus vague (on y reviendra après). L'extérieur n'est plus un rêve mais devient de plus en plus concret et sombre au fur et à mesure qu'on s'y aventure, et à contrario, la maison est lieu d'émerveillement. Le but n'est pas tant de remettre en question la morale du premier film que d'approfondir la complexité qui y est développer. La famille Croods doit faire face à leurs choix que de quitter leurs cavernes, et Guy doit faire face à la nécessité de survie. Après un premier film qui parle de prendre conscience du monde qui s'effondre et de quitter une zone de confort parfois toxique, il est maintenant question de stabilité. L'identité n'est plus relié à une simple question de vouloir être ouvert ou non au monde, mais est rattaché à une philosophie. On a la confrontation entre deux familles voulant chacune conserver une identité qui leur est propre.


Vu qu'il est question de questionner l'identité et d'aller vers une forme de stabilité, la mise en scène épouse ces problématiques. Il ne sera pas rare de voir des scènes plus proches des personnages, parfois se limitant à un champ contrechamp, et laissant des plans assez long et épurés afin de pleinement laisser parler les personnages. Après avoir voyager, il faut savoir se poser et parler à cœur ouvert. Le tout est sublimé par une animation et un travail sur les expressions faciaux qui est remarquable. Là où le premier film pêchait d'une animation et d'une qualité visuel parfois en dent de scie, le second film est un bonheur perpétuel pour le regard. Les personnages ont la possibilité de nous émouvoir à travers un jeu d'acteur porté pardes acteurs de talent. L'une des personnes qui se dégage très largement du lot reste Eep, porté par une Emma Stone qui ne fait plus qu'un avec le personnage, en plus d'en prêter les traits pour sa conception. On y retrouve ses mimiques et son jeu tout en subtilité, le tout accompagné de répliques beaucoup plus subtiles et léger que dans le premier film.


Comme dit précédemment, Les Croods 2 est un film qui a pour but de rendre les lignes de plus en plus trouble. Il ne sera pas étonnant que le merveilleux ne soit plus tant rattacher à une valeur binaire de "dehors = bonheur / maison = terreur", mais que cela soit quelque chose de plus subjectif. Si le spectacle se trouve dans le repos et la sécurité de la famille Crood, il peut aussi se trouver dans le bonheur de la fille Betterman qui découvre enfin le monde derrière le mur. L'échange entre les deux cultures est plus marqué, et vient questionner le rapport qu'a le réalisateur avec le premier film. Il est alors question de point de vue et de, à l'image du fils Croods lors de son arrivé chez les Betterman, de découvrir la joie de regarder l'univers Croods sous une "nouvelle fenêtre". Cependant, peu importe les lectures divers, peu importe quel famille apporte plus à l'autre, toutes ces lectures tombent sur un même constat: chacun a besoin de l'autre, et c'est en ayant une meilleur écoute de son environnement que l'on arrive à une harmonie entre les différents points de vues. Il serait peu dire que, au terme du premier visionnage, ce deuxième film m'a mis une claque d'autant plus grosse que le premier volet, voire même plus grande. Cependant, j'ai mes réserves.


Cela peut paraitre bête dit comme cela, mais en ayant revu le film une seconde fois, après avoir revu le premier film au préalable, je me suis retrouvé complètement perdu. Comme je le disais précédemment, le film invite à voir ses lignes devenir de plus en plus vagues, et cela amène une sur-dose de signifiant et de niveaux de lectures qui peut perdre si l'on a le malheur de trop prendre d'analyser les différents thématiques traités... qui deviennent presque trop nombreuses. Si l'on se pose et que l'on propose de se recentrer sur le besoin des personnages d'avoir une vie stable, on a paradoxalement beaucoup plus de thématiques et de problématiques que dans le premier film, ce qui en fait un film plus dense et complexe à analyser. Cela n'est pas aidé par des moments de pures créations, où le film va pour relâcher la pression et la tension. On peut voir, notamment au niveau de l'humour, les premiers signes de violence et d'étrange violence que l'on retrouvera plus tard dans Chat Potté 2 et ses séquences de combat entre Chat Potté et le loup. J'y trouve un sens à travers un côté parfois méta (notamment un gag à base de bâton dans la figure) qui renforce la présence des multiples possibilités de lectures, mais il est tout aussi probable que ces scènes ont juste aucun sens profond si ce n'est innover en terme de mise en scène. Sans doute que le problème vient essentiellement du fait que, avec une franchise aussi passionnante, on ait envi de tout saisir et de tout analyser pour comprendre au mieux tout les tenants et aboutissants. Le soucis étant qu'en terme de pure analyse, le film peut perdre sur certains aspect, et devient ainsi moins lisible que le premier film.


Au final, Crood 2 se révèle pas tant moins bon ou même foncièrement meilleur que le premier film, ce qui est un exploit déjà en soit. J'aurais tendance à dire que son écriture plus subtile et ses graphismes nettement plus propres en fait un film factuellement meilleur que son prédécesseur, mais que la morale et sa lecture est peu être moins simple à aborder. Sans doute que tout est question de point de vue... ou du moins, question de fenêtre.


17/20


N’hésitez pas à partager votre avis et le défendre, qu'il soit objectif ou non. De mon côté, je le respecterai s'il est en désaccord avec le miens, mais je le respecterai encore plus si vous, de votre côté, vous respectez mon avis.

Créée

le 5 nov. 2023

Critique lue 10 fois

Youdidi

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