Les crimes de David Yates

L'univers d'Harry Potter a toujours eu une place très importante dans ma vie. Sept livres, huit films avec lesquels j'ai grandi et qui m'ont fait rêver durant mon adolescence. Des personnages auxquels je me suis fortement attaché (hi, Neville Longbottom). Donc forcément, mon objectivité sur la saga est proche du néant.
Les Animaux fantastiques, autre livre de JK Rowling, est par contre beaucoup moins connu. L'univers n'a pas la même attirance qu'Harry Potter. Et puis surtout, adapter un livre de 96 pages en 5 longs-métrages, le pari est culotté et on sent à peine l'attrait commercial de la saga.

Le premier film, Fantastic Beasts, sorti en 2016, était moyen, sans plus. Ce deuxième film est dans la même veine. Mais pire encore : il est frustrant.
Le film aurait dû seulement s'appeler Les crimes de Grindelwald. Ils sont où, ces animaux fantastiques ? Un Niffleur par ci, un Zouwu par là, et puis c'est tout. Le premier film avait au moins le mérite de s'attarder longuement là-dessus, et même d'en faire son fil directeur, puisque c'est de ça donc il devrait parler, après tout, it's right there in the title. Mais ici, non. On a une histoire bancale, un conflit Gridelwald/Dumbledore à distance, et Newt qui se retrouve malgré lui comme le pompier de service. On connaît le penchant de David Yates pour l'inconsistance, lui qui a réalisé quelques uns des meilleurs mais aussi des plus mauvais films de la saga Harry Potter. Ce film-là ne déroge pas à la règle. Il est maladroit, ne semble jamais savoir où aller. Ces variations brusques d'échelle de plan, notamment lors de la rencontre initiale entre Leta Lestrange (jouée par une convaincante Zoë Kravitz) et Newt Scamander au ministère de la Magie, où l'on passe de gros plans type caméra subjective pendant les dialogues à des contrechamps plus généraux, sont assez verbeuses et témoignent de l'incapacité de David Yates à proposer une cohérence dans son récit. Et plus triste encore, de ses intentions assez floues.

Pourtant, David Yates est capable de beaux moments et le film est traversé par plusieurs belles fulgurances : de jolis moments d'émotion, comme entre Newt et son frère Theseus. Il est aussi capable de purs moments de magie. Et on doit bien lui admettre une esthétique bien à lui, quoi qu'on en pense. Mais c'est à peu près tout, le reste étant d'un vide et d'une platitude assez flagrants. La réalisation de David Yates souffre d'un gros manque de dynamisme. Et pourtant, le film a réussi à me perdre.

Le long-métrage enchaîne les arcs narratifs sans jamais donner l'impression d'avoir un véritable fil directeur, enchaîne une ribambelle de personnages dont il est difficile de comprendre les motivations, ces dernières étant à peine survolées pour Grindelwald dans le final. Le film est beaucoup trop dense pour le peu qu'il raconte, et par conséquent l'impact émotionnel et la cohérence du récit sont malheureusement moindres.

C'est fortement dommage, car le film aurait pu avoir un énorme potentiel entre les mains d'un réalisateur plus compétent. Ce Fantastic Beasts garde quelques bonnes choses à retenir (Jude Law en Dumbledore, Zoë Kravitz en Lestrange), mais qui sont trop peu nombreuses. Au final, le film fait du remplissage pour du remplissage, sans aucune personnalité derrière, en témoigne ce twist final racoleur, putassier, incohérent et sorti de nulle part, voulant forcer le spectateur à se précipiter vers le troisième volet (je ne vais pas vous mentir, j'irai sans doute le voir). J. K. Rowling nous a déjà prouvé qu'elle était une très grande créatrice d'univers, mais elle nous montre ici qu'elle est une mauvaise scénariste, autant que David Yates est un médiocre réalisateur. Six films sur l'univers, ça fait beaucoup : méfait accompli, David.