"In a police state, the police is always busy."

17 ans après son duo hautement singulier avec Tony Curtis dans "La Chaîne" (The Defiant Ones, Stanley Kramer, 1958), Sidney Poitier s'illustre à nouveau dans une autre forme d'enchaînement avec un personnage blanc, au sens un peu moins littéral, en la personne de Michael Caine. On peut énormément regretter la construction à la truelle des enjeux dans les premiers du film, même ce constat n'était sans aucun doute pas valable à l'époque de la sortie, où l’apartheid était encore une réalité institutionnelle. Ralph Nelson n'a à ce titre pas pu tourner en Afrique du Sud (mais au Kenya), on le comprend assez naturellement étant donnée la charge militante du scénario contre ce proéminent symbole d'oppression. Mais tout de même, alors que la majorité des personnages, dans leur incroyable diversité, fait l'objet d'une profondeur et d'une originalité très appréciables, la description de la situation de ségrégation est vraiment posée avec la délicatesse d'un pachyderme — quand bien même elle serait véridique, elle n'en reste pas moins inadaptée au format cinéma, me semble-t-il.


C'est quand même un film qui tourne autour de la fuite d'un prisonnier noir fraîchement libéré accompagné du mari blanc de son avocate, dont l'origine de la cavale se trouve dans la réponse à une arrestation injustifiée dépeinte de la plus maladroite des manières. Cette scène qui constitue un peu le fondement du film est incroyablement bâclée, et entretient un aspect globalement bancal, malheureusement. Sidney Poitier et Michael Caine passeront tout le film à tenter de renverser la vapeur, en quelque sorte... Dans leur traversée de cet état autoritaire et raciste, les deux hommes seront amenés à faire beaucoup de rencontres (la présence du jeune Rutger Hauer est assez "drôle") et à se trouver dans de nombreuses situations intéressantes, bien qu'elles se trouvent quelque peu parasitées par les obligatoires scènes d'action, ratées. Une histoire de diamants viendra se greffer à l'intrigue et parasitera un peu le reste du propos, mais qu'importe. Le mélange des genres qui navigue entre aventure et comédie, sur un arrière-plan politique très net, parvient à articuler le sérieux du propos avec une certaine légèreté dans la relation complexe entre Poitier et Caine, comme une sorte de faux buddy movie. Le final sera quant à lui tout aussi bâclé que l'introduction, enfermant de bonnes intentions et une originalité certaine dans l'écrin d'une série B un peu trop modeste.

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le 31 mai 2020

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Morrinson

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