
La Sicile a son propre mode de fonctionnement qui est dicté par la cosa nostra. C'est une plongée dans la mafia dans laquelle nous entraine Bellocchio. Le système a perdu ses codes, ce n'est pas qu'il était juste, mais depuis l'arrivée de Totò Riina on supprime à tour de bras. Lorsque Buscetta a rejoint la mafia, personne ne tuait les enfants, ni les femmes, pour le reste on ne faisait pas vraiment de sentiments. Riina fait régner un régime dans lequel tout le monde est un ennemi à supprimer. Les anciens amis d'hier sont les nouvelles cibles à abattre. Buscetta vivant au brésil c'est par le biais de sa famille que Totò Riina va le toucher. Il fera supprimer ses enfants. Buscetta lasse de ce système finira par tout déballer au juge Falcone.
C'est une part importante de l’Italie à laquelle s'attaque le film de Bellocchio, il traite dans celui-ci d'un état dans l'état. La mafia est partout, elle gangrène la Sicile, l’Italie et bien d'autres pays. Le récit n'est pas fictif puisque tous les gens dont parle le film ont existé, certains sont encore incarcérés actuellement. Bellocchio tente de nous plonger dans les années 80 et 90, seulement son image est bien trop contemporaine, même chose pour les éclairages des scènes qui transpirent les années 2020. Autant dire que l'ambiance des années que l'on tente de nous faire revivre n'est pas réellement présente. Certes les costumes et les voitures sont raccords à l’époque, mais le reste fait grandement défaut. C'est encore pire quand le réalisateur insère dans ces scènes de vraies images d'archives. Le décalage entre les deux saute aux yeux. S'il veut ça plus réaliste, c'est raté car c'est l'inverse qui se produit. Le début du film n'est pas des plus clairs, Bellocchio montre pleins de personnages mais on ne sait pas bien qui sont ces gens et quel est le leur rôle dans l'organisation. Heureusement par la suite les choses s'éclaircissent. Le procès donne l'occasion de mieux situer les personnages. Cet instant est la meilleure partie du film. Buscetta est l'homme par qui la mafia vacille et finira par tomber. Les plus grosses têtes de l'époque finiront devant le tribunal. Buscetta n'est pas un repenti, il n'accepte pas les méthodes de Riina, voilà pourquoi il parle.
Le film de Bellocchio est nettement moins fort que ne l'est le documentaire racontant la même affaire qui se nomme Corleone, le parrain des parrains. L'explication de l'assassinat du juge Falcone par l'homme qui a déclenché la charge explosive est bien plus impressionnant que ne l'est la scène du film. Tout est bien plus complet dans le documentaire. Si Bellocchio chiffre les meurtres il n'en montre pas beaucoup. Et la froideur avec laquelle ces gens assassinent ceux qu'ils côtoient au quotidien et même pour certain qu'ils ont vu grandir n'est pas très bien représentée. Les cadavres étaient retrouvés au petit matin dans les poubelles, c'est dire l'importance que ces hommes accordaient à la vie des autres. Le documentaire est bien supérieur au film. Entendre les vraies personnes parler de leurs actions dans Cosa Nostra est bien plus effrayant que ne l'est le traître. Pour la même durée on apprend plus, on contextualise mieux et surtout les témoignages sont ceux des membres de Cosa nostra et ça, ça change tout.