J'avoue que ce qui m'a amené vers ce film, c'est le béguin que je ressens pour Lou de Laâge et parce que j'avais envie de la voir dans un même personnage vivant plusieurs vies différentes. Bordel, heureusement qu'elle est là, sinon ce serait un navet complet. L'unique mérite du Tourbillon de la vie est de montrer que cette comédienne est suffisamment talentueuse et charismatique pour porter tout un film sur ses épaules.


Bon, le principe de la protagoniste, dont on voit les diverses existences, dépendant non seulement de ses choix, mais aussi des petits "accidents de la vie", des petits "riens du tout" qui ont la possibilité de faire changer complètement de trajectoire le cours d'une destinée, n'est pas inédit. Reste que ça aurait pu donner un résultat charmant, profond, efficace. C'est une structure narrative enthousiasmante, car elle peut donner lieu à de nombreuses et variées situations scénaristiques, à une base idéale pour être surprenante (ben oui, il n'y a rien de plus imprévisible que nos vies, tout peut être bouleversé en une circonstance, en une rencontre, en une seconde !).


Ben non, c'est juste cliché sur cliché sur cliché. C'est du vu et revu. Mais, ce n'est pas ça le pire. Le pire, c'est qu'au sein de cette accumulation de clichés, l'histoire, constamment en avance rapide, ne prend jamais le temps d'approfondir les personnages secondaires, qui, en partie à cause de ce défaut, mais aussi découlant des clichés scénaristiques, ne sont que... devinez quoi ?... des clichés sur pattes. Et quand je parle de personnages secondaires, je ne parle pas, par exemple, de quelqu'un avec qui l'héroïne a une conversation sympathique de cinq minutes lors d'une soirée et qu'elle ne revoit plus jamais après. Non, je parle plutôt de ses parents, de ses petits amis/maris, de ses enfants, de sa meilleure pote. Enfin... vous voyez... le genre d'êtres qui ont une influence, positive ou négative, incontestable sur notre vie. Tous ses personnages sont, au mieux, résumés à des situations et des caractéristiques... oui, clichées, au pire, à des silhouettes qui passent vite, sans marquer le moins du monde le spectateur. Vous voulez que je vous donne un exemple précis ?


Vers la fin du fin, le personnage féminin retrouve un ancien camarade de musique qui lui avoue qu'il était amoureux d'elle, sans jamais avoir osé le lui faire savoir. Euh OK... c'est bien, tout ça, mais l'impact émotionnel n'aurait-il pas été considérablement plus important si on avait vu ce prétendant sur une durée plus grande que cinq pauvres secondes au tout début, si le tout avait pris au moins quelques minutes pour le présenter, pour bien mettre en exergue le fait qu'il n'ose pas parce qu'il pense n'avoir aucune chance pour qu'on le retrouve avec joie avec une plus grande audace, pour que l'on le retienne tout simplement ? Comment un spectateur est censé ressentir une forte émotion pour les sentiments d'un type vite croisé, vite oublié ? Là, ça sort de nulle part. Ah oui, et les situations clichées ne sont pas non plus approfondies puisque tout est en avance rapide.


Il aurait peut-être fallu... ben, déjà enlever l'overdose de clichés ou, du moins, supprimer des "vies" de la protagoniste pour pouvoir creuser celles qui restent, pour leur injecter de la chair. Oui, le naturel, la spontanéité, la subtilité, le film n'en veut pas.


Et pour bien enfoncer le dernier clou du cercueil du point de vue de l'écriture, on a le droit à tout un dernier tronçon bien inutile (celui après l'enterrement !) lors duquel toutes les intrigues, sans exception, doivent se conclure par un happy end. Oui, pour nous faire passer le message que tout ne peut que bien se finir... attendez, attendez... non... il y a des situations de merde ne se résolvant pas parce que la vie est souvent injuste... il y a des existences se concluant d'une manière merdique parce que la vie est souvent injuste... Il y a une des existences en particulier, lors de laquelle notre héroïne est véritablement au fond du fond du trou, qu'elle creuserait un peu plus qu'elle serait au centre de la Terre. Pourtant, sans le montrer, mais en le suggérant très fortement, par la magie de la paresse scénaristique, tout s'arrange facilement pour notre malheureuse. Il n'y avait pas la possibilité, sur quatre existences (oui, il y a quatre existences en tout !), d'au moins montrer à travers une que... non, tout ne s'arrange pas obligatoirement. Cela aurait gagné en justesse.


Et dans ce même tronçon, dans une autre intrigue, oh mon Dieu, une femme souhaite vivre indépendamment, en conservant son propre appartement, se refusant à partager le même toit que son compagnon. Bref, se gérer entièrement toute seule. Mais, ça ne va pas la tête, femme ? Quelle anormale, celle-là ! Quelle hérésie ! Quelle infamie ! Femme, tu te dois de vivre de la façon la plus conventionnelle qui soit, malgré tes envies profondes..., de suivre les souhaits de ton compagnon... non, mais...


Ah oui, pour la toute fin, la toute dernière scène, faisant exploser le mesureur du cliché (déjà bien détraqué, car trop utilisé jusque-là !), je n'ai même pas envie de m'attarder sur le cliché du cassos s'améliorant au contact de l'art grâce à quelqu'un qui lui est socialement et intellectuellement supérieur... ça me gonfle...


Pour achever de rendre l'ensemble insupportable, il y a la BO ultra-conventionnelle, tout de suite oubliée, car déjà chiée un milliard de fois, à base uniquement de piano et de violon (oui, maintenant, pour émouvoir au cinéma, c'est uniquement du piano et du violon, que j'apprécie énormément, je précise, là, n'est pas le problème, mais, merde, un peu de diversité, de créativité dans le choix des instruments et dans leur utilisation !), pour bien souligner quand on se doit trop d'avoir les yeux humides. Premièrement, il existe, d'après Google, environ 150 instruments de musique différents dans le monde. Deuxièmement, le nombre de grands compositeurs, bien talentueux, de BO de films, encore vivants ou, en tout cas, toujours en activité, se compte largement sur les doigts d'une main (putain, dire qu'avant, ils se comptaient par dizaines !). Troisièmement, le film a pour personnage principal, une pianiste soliste. Ce qui était le prétexte parfait pour faire appel exclusivement à des compositeurs classiques. Certes, un morceau de Debussy ou de Bach ou de Mozart ou de n'importe quel autre géant peut être mal intégré, ne pas correspondre au ton de la scène, mais, néanmoins, la qualité de l'œuvre, bien ou mal choisie, est d'une qualité incontestable. Ce qui aurait été à chaque fois mieux que la véritable merde auditive que l'on entend.


Qui c'est le responsable de ça, d'ailleurs ? Raphaël Treiner ! Attendez, le réalisateur de ce navet ne s'appelle pas Olivier Treiner ? Et la personne qui a co-écrit, avec le cinéaste, le scénario de ce même navet, Camille Treiner ? Oh, la nullité en famille, qu'est-ce que c'est mignon !


Et pour la chute du mur de Berlin, il n'y a eu que quelques pauvres figurants épars lors de cet événement historique incroyable ? Manque de moyens peut-être ? Ben, dans ce cas-là, la séquence aurait pu être supprimée ou remplacée par autre chose.


Et putain de bordel de merde, qu'est-ce qu'a voulu dire Olivier Treiner avec son machin ? Qu'une simple décision est capable de définir tout le reste de notre passage sur Terre ? Qu'une existence est capable d'être modifiée considérablement par le plus ridicule détail, par la plus minuscule situation ? Sûrement, mais j'ai surtout retenu que tout finit obligatoirement bien, même si vous êtes enfoncé jusqu'au haut du crâne dans les emmerdes... parce que... parce que... voilà. J'ai retenu aussi que nos existences ne sont qu'une accumulation de clichés bien clichés, chaque seconde de notre insignifiante vie. Et qu'une femme avec un compagnon ne peut pas vivre indépendamment, toute seule, dans son propre logement. Et qu'il n'y avait pas grand-monde lors de la chute du mur de Berlin.


Qu'est-ce que l'on ne ferait pas pour un béguin ?

Plume231
2
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2022

Créée

le 6 janv. 2023

Modifiée

le 6 janv. 2023

Critique lue 1.7K fois

17 j'aime

10 commentaires

Plume231

Écrit par

Critique lue 1.7K fois

17
10

D'autres avis sur Le Tourbillon de la vie

Le Tourbillon de la vie
Azur-Uno
8

La vie kaléidoscopique, ou le hasard et la nécessité

Pour le premier long métrage d'Olivier Treiner c'est une belle réussite !Reposant sur les hasards que la vie nous offre, et au-delà de ses propres choix, (l'oubli d'un passeport, l'issue d'un pile ou...

le 23 déc. 2022

12 j'aime

10

Le Tourbillon de la vie
Val_Cancun
3

Lou prend de l'âge

Ce sont ses ultimes 20 minutes qui font basculer "Le tourbillon de la vie" de film moyen à film raté, avec en point d'orgue une ultime séquence qui se voudrait bouleversante mais apparaît grotesque,...

le 30 déc. 2022

7 j'aime

3

Le Tourbillon de la vie
In_Cine_Veritas
8

Carré de destins

Après la réalisation de plusieurs courts-métrages dont L’accordeur en 2010, Olivier Treiner livre son premier long-métrage titré Le tourbillon de la vie. Il peut être dessiné un lien entre...

le 23 déc. 2022

7 j'aime

Du même critique

Babylon
Plume231
8

Chantons sous la pisse !

L'histoire du septième art est ponctuée de faits étranges, à l'instar de la production de ce film. Comment un studio, des producteurs ont pu se dire qu'aujourd'hui une telle œuvre ambitieuse avait la...

le 18 janv. 2023

285 j'aime

19

Oppenheimer
Plume231
3

Un melon de la taille d'un champignon !

Christopher Nolan est un putain d'excellent technicien (sachant admirablement s'entourer à ce niveau-là !). Il arrive à faire des images à tomber à la renverse, aussi bien par leur réalisme que par...

le 19 juil. 2023

208 j'aime

28

The Batman
Plume231
4

Détective Batman !

[AVERTISSEMENT : cette critique a été rédigée par un vieux con difficile de 35 piges qui n'a pas dû visionner un film de super-héros depuis le Paléolithique.]Le meilleur moyen de faire du neuf, c'est...

le 18 juil. 2022

137 j'aime

31