J'avais entendu parler de ce western, mais je n'avais jamais réussi à le voir, c'est chose faite, et mon titre de critique est un clin d'oeil au titre original (the Deadly trackers).
On pourrait croire qu'il s'agit d'un western italien, mais il n'en est rien, c'est un vrai western américain, mais plus de l'époque classique des années 50 ou même 60, non il s'agit d'un western typique des années 70, très inspiré des westerns spaghetti un peu sanglants comme Tuez-les tous et revenez seul. Le traitement général du film, l'emploi de la violence et l'utilisation du décor mexicain font justement penser aux westerns italiens du début des années 70, à une époque où le western à Hollywood était moribond, et en 1973, même le western italien vivait ses derniers feux, le dernier grand western officiel de ce pays étant Mon nom est Personne.
Il est vrai que la violence est ici assez caractérique du relâchement du genre à cette époque, et ça va même loin car on n'hésite pas à tuer un enfant dans une scène atroce ; je ne sais pas comment a pu réagir le public américain devant une telle audace, mais j'imagine que ça a dû faire grincer des dents, quand on sait comment Henry Fonda fut jugé dans Il était une fois dans l'Ouest lorsqu'il tue le gamin du ranch. L'intrigue est d'ailleurs basée sur une vengeance implacable où le sheriff en question incarné par Richard Harris ne pardonne pas en effet, l'assassinat de sa femme et de son enfant par une bande de détrousseurs de banque menée par un Rod Taylor enragé ; je crois que c'est la seule fois où cet acteur incarne un rôle de méchant aussi ignoble.
A l'origine, le projet était porté par Sam Fuller, d'après son roman, il avait commencé les prises de vues, mais à la suite de divergence artistique avec Richard Harris, il fut remplacé par Barry Shear, réalisateur venu de la télévision ; même si on lui doit un excellent polar, également violent en 1972, Meurtres dans la 110ème rue, il n'a pas laissé une empreinte marquante dans le cinéma hollywoodien de cette époque. Succéder à Fuller n'était pas chose facile, d'où une mise en scène étrange, avec des étirements de scènes, des petites longueurs inutiles, un rythme un peu haché, un personnage un peu grotesque avec un morceau de rail en guise de main... tout ceci donne un western assez atypique. Le film avait été tourné en Espagne, à Almeria, là où Sergio Leone a tourné sa trilogie des dollars, mais je crois que tout a été retourné au Mexique.
Ce qui apporte un plus indéniable, c'est le festival de "gueules" réuni dans ce western : avoir Richard Harris, Rod Taylor, Neville Brand (un des meilleurs bad guys des années 50), Al Lettieri (qui sortait des polars à la Charles Bronson en incarnant ici un officier mexicain), et le costaud William Smith (qui plus tard, se fritera la tronche avec Clint Eastwood dans Ca va cogner), ça fait vraiment rêver tous les bisseux, car le film reste quand même une sorte de pépite rare dans le western et dans le domaine du cinéma bis. A son crédit, on peut y voir aussi une réflexion intéressante sur la violence, la justice absurde et les justiciers.

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le 29 sept. 2021

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Ugly

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