Pas tout le monde se décide à être sincère à notre époque. Pas tout le monde ose montrer sa faiblesse. Pas tout le monde peut exprimer la sympathie et l’affection pour les losers et les gens très sensibles. Et le directeur Eugène Green n'avait même pas eu à oser de se décider de faire ça, apparemment. Parce qu’il a l’air d’avoir établi cette mission pour lui-même il y a longtemps – la mission d’inonder l’écran avec la lumière de son âme, de parler au monde des coins cachés des coeurs des gens les plus tendres du monde, de son amour pour l’art et tout ce qui est beau – de manière la plus ouverte et comme si en pleurant quelque part hors-champ pour leur sort difficile.
La protagoniste Sarah a un bien-aimé, mais son modèle du bonheur est simple, il a les angles parfaitement droits et ne correspond pas à l’essence complexe de la jeune fille. Et celui qui la comprenne sans mots et même, peut-être, devienne son sauveur, - l’étudiant Pascal qui adore la poésie de Michelange – la trouve trop tard, quand on ne peut déjà rien changer. «Le Pont des Arts» est un film-consolation pour ceux qui ont manqué l’un l’autre à un moment le plus important. Eugène Green a unis les âmes d’ange des gens fragiles sur le Pont des Arts à Paris.
Ils regardent directement dans la caméra, parlent en étant éloignés, se taisent expressivement. Elle chante et se mélange dans ce chant, perd le chemin vers elle-même, et, quand la mélodie s'arrête, elle n’est plus là. Il vit et qui sait, s’il cherche ou ne cherche pas сe sens, mais il la trouve. Il la trouve quand, d'un côté, c’est déjà trop tard, et d’autre côté, - c’est jamais trop tard. Ils se rencontrent sur le Pont des Arts, et c’est la rencontre la plus impossible du monde, il ne peut pas la toucher, et seulement leurs ombres se réunissent en un seul. Maintenant elle est en lui pour toujours, elle a trouvé son chemin. Elle a trouvé l'immortalité dans l’art en détruisant soi-même tant que personne.
La vie humaine est, essentiellement, vide est insensée, et on n’a pas même besoin de mots pour la décrire. La thèse sur le thème crucial est une page blanche, parce que le thème crucial est vide et stupide. Ce qui est véritable ne peut pas être exprimé par le mots, cela doit être senti en silence, entendu dans les notes, reçu, et non pas compris. Quand elle chante de l’amour, le texte de la chanson n’est pas important, il est important que l’amour soit dans sa voix. Il est impossible de raconter quel est le sens de la vie, l’amour est le bonheur, parce que, comme l’a dit Tiouttchev au XIXe siècle, la pensée proférée est le mensonge, et, bien sûr, il a menti par ces mots. Mais parfois, quand le vide accablant vous pousse à un pas irréparable, écoutez attentivement ce vide et, peut-être, vous entendrez quelque chose valant la peine de vivre.

anna_lumiere
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le 25 sept. 2017

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Anna Soloviova

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