Shinkai est un moine débauché qui verse dans les plaisirs de la boisson, de la castagne, de la chair et du jeu. Mais par ses vices ostensibles, il sera la révélateur de la corruption d'une institution religieuse hypocrite dont les hauts représentants qui le dénigrent n'hésitent pas à pactiser avec les yakuza pour faire évincer le Maitre Supérieur et assurer la poursuite de l'exploitation sexuelle des femmes dont tous tirent bénéfice.
Le Moine sacrilège concentre ainsi ses enjeux sur la prostitution qui semble guetter jeune provinciale naïve, fugueuse et autre marginale. La traite de ces femmes est un business incontournable qui corrompt l'âme de tous ceux qui n'ont d'autres choix que d'en être les rouages tandis que les plus charognes en amassent le profit. Les yakuza sont ici montrés comme les sangsues violentes qu'ils sont, ne laissant jamais repartir leurs proies qu'ils accablent sans fin de dettes à rembourser avant de finir par les vendre à l'étranger.
Shinkai est un personnage traversé de paradoxes : il profite allégrement des services offerts par la pègre tout en exprimant son mépris de ce système qu'il finira par tenter de faire tomber, dans un rapport très personnel à la voie de Bouddha. Mais il est à l'image des autres personnages qu'il cotoie, des petits salauds du quotidien tels ces gamins miséreux, dont Kentaro, qui utilise son bagout pour jouer les rabatteurs mais qui rêve d'échapper à ce système mafieux avec son amante (qu'il a lui-même entrainé dans l'enfer des maisons closes) pour ouvrir un restaurant. Et même les plus nobles (le Maitre Supérieur) peuvent voir leur passé trouble ressurgir.
Malgré ces thématiques sérieuses, le film demeure une série B où les conflits finissent souvent en baston généralisée et où peu de femmes résistent au charme transgressif de Shinkai, sans non plus se refuser de tourner au drame familial riches en larmes. Tomisaburo Wakayama rayonne déjà en moine goguenard et castagneur mais capable de sévères leçons de remontrance, dont le finish ensanglanté préfigure sa future interprétation inoubliable de Ogami Itto. Le Moine sacrilège est plus globalement parsemé de trognes, que ce soit les gamins des rues (y'en a un dont on ne sait si c'est réellement un môme ou un adulte difforme), le moine corrompu ou, plus au second plan, Bunta Sugawara qui a une tronche de pur psychopathe.