American dream : va de retro satanas

Première image qui portera le film durant 106 minutes : le visage d'un homme, Benjamin Braddock, magnifiquement interprété par le jeune Dustin Hoffman, qui nous semble absent. Tourmenté. En proie a des doutes. Alors que son avion s'apprête à atterrir à Los Angeles ; une météo clémente ; il va retrouver ses proches.


Ben est fraîchement diplômé, en passe d'accéder aux études supérieurs. Issue d'un milieu aisé comme nous le montre le film (belle maison, belle voiture offerte par les parents...) il est accueilli en héros par son entourage. Pourtant intérieurement ça bouillonne, il a peur de l'avenir. Il n'est pas à sa place ici. Il le fait savoir à son père, personne ne l'entend. Le monde voit en Ben un avenir que Ben refuse de vivre.


L'avenir c'est ou ?

L'avenir c'est quoi ?

C'est ce que l'Amérique offre à sa jeunesse : un itinéraire tout tracé. Des études et un passage à la vie étudiante, des projets et des opportunités (le plastique c'est l'avenir lui dira un invité lors de sa la fête pour son retour), une grande et belle maison, un mariage... Dans sa façon de communiquer, de se mouvoir, de sourire, on ressent que Ben n'est pas à sa place. Et moi, spectateur, je ressens l'oppression de ces regards et de son environnement. Benjamin fait du sur place chez lui, il décide de flâner malgré la pression familiale pour poursuivre le "Projet".


Le personnage de Ben va commencer à se libérer grâce à une rencontre. Il entretiendra une liaison avec Mrs Robinson, plus âgée que lui. Elle fait partie du voisinage proche de la famille. Une relation socialement impossible à assumer. Une relation avec une femme qui incarne selon moi les conséquences de cet avenir tout tracé qui est effrayant. La séquence au lit, lorsque Ben commence à s'intéresser à elle, est révélatrice : elle vit dans un confort matériel cependant elle a dû abandonner l'art et refuse d'en parler, elle a sombré dans l'alcool, elle est a été comme dépossédé de sa vitalité pour un mariage sans amour qu'elle subit aujourd'hui au quotidien. Cette liaison avec Ben lui redonne un certain goût à la vie.


Malgré lui Ben, sous la pression familiale, se mettra à côtoyer Elaine la fille de Mrs Robinson. Il tombe amoureux. Mrs Robinson ne l'accepte pas. S'ensuit une fuite en avant pour Ben qui retrouvera l'énergie, malgré tout les obstacles, pour conquérir la cœur de Elaine. La deuxième partie du film, en mouvement perpétuel donne un élan de vitalité au personnage de Benjamin. Il ira à la conquête de Elaine, il exorcisera cet avenir qu'on leur promet et prendra la fuite la rire aux lèvres, pour ensuite retrouver un visage absent qui interroge...


La manière dont Mike Nichols suggère et orchestre le décalage de son personnage, vis-à-vis de son environnement, est magnifique. La jeunesse désapprouve cet idéal qu'on leur impose. Benjamin ne voit que des individus parler sans rien dire, il veut sortir de cet aquarium. Il n'est pas à sa place. Le tout est porté par une BO de Paul Simon & Garfunkel qui colle à ce que le film nous montre. Le casting est très bon dans son ensemble. Pour conclure je dirai que ce film dégage une grande mélancolie.

Ssird
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le 28 août 2022

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Ssird

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