Un duo intriguant

Le film est construit sur les trajectoires parallèles d'un gitan aux allures fébriles de voyou justicier, et d'un élégant gangster de la vieille école. De Palavas-les-Flots à Champigny-sur-Marne, le hasard les conduit sans cesse aux mêmes lieux, semant le trouble chez la police : sont-ils complices? L'acmé du film sera leur rencontre tant attendue, en mode amitié virile au-dessus des lois, à la Melville. Mais allez donc savoir si quelqu'un au tournage y a pensé, ça glisse sacrément vers autre chose. La rencontre se fait dans parking souterrain avec un Delon tout mouillé, ils montent chez le vieux qui offre une douche au giton (pardon gitan), lequel se retrouve en peignoir éponge saumon face à un délicat hôte en peignoir soie bleue, ils sont très mimis. On pourrait penser aux tartines partagées des vieux de TOUCHEZ PAS AU GRISBI. Mais ça continue : "Tu sais que je partirai à l'aube" susurre Delon avec une pointe de regret, "Des histoires comme les nôtres ça se termine souvent à l'aube, répond Paul Meurisse blasé. Cette relation homo non dite est ce qui reste de plus intriguant dans un film bien mené malgré certains couacs (Anna Girardot condamnée à 3 scènes de numéro d'actrice en crise). Quelques images dans un camp de gitans nous rappellent le titre et le thème annoncé, mais Delon est trop loup solitaire pour qu'on y croit - malgré la belle moustache. Non, décidément, c'est bien le parallèle Delon/Meurisse qui fait le film, et le conduit sur un sentier mélancolique inédit.