Adapté du roman Kiss Tomorrow Good-bye écrit par Horace McCoy et publié 1948, Le Fauve en liberté permet à James Cagney de s'illustrer une nouvelle fois dans un film gangster. Un genre dont l'acteur a donné ses premières lettres de noblesse au début des années 30 et lui a permis de devenir l'immense interprète que l'on connaît aujourd'hui.


Les premières minutes du film s'ouvrent sur la plaidoirie d'un procureur mettant en accusation un avocat, deux policiers, un gardien de pénitencier, une femme et deux criminels, tous complices pour meurtre. Le scénario signé Harry Brown et Horace McCoy réside dans la description d'une société pessimiste dans laquelle les professions notables (avocat, docteur en philosophie et métaphysique) et institutions légales (policier, gardien de prison) sont indignes de confiance et aussi corrompus qu'un gangster comme Ralph Cotter (James Cagney). La séquence la plus symbolique serait celle du braquage des convoyeurs. Cotter utilise un uniforme de policier pour endormir la méfiance de ses victimes. En tant que criminel, en endossant ce signe distinctif du respect de l'ordre et de la confiance du citoyen à l'égard de la loi, il le pervertit et démontre que les apparences peuvent être trompeuses.
Cependant, si certains de ces personnages ont basculé dans la criminalité depuis longtemps, c'est au contact de Ralph que leur chute est amorcée. En effet, il agit comme un trou noir empêchant ceux qui le côtoient de s'échapper de son emprise. Sur ce point, Whitey Bulger (incarné par Johnny Depp) dans Black Mass réalisé par Scott Cooper fait énormément penser à Ralph Cotter.


Cotter étant un personnage psychopathe et insouciant (cultivé aussi, mais c'est très peu exploité), l'interprétation de Cagney se rapproche de ce qu'il avait fait auparavant avec les rôles de Tom Powers (L'ennemi Public) et Cody Jarrett (L'enfer est à lui) que de ses gangsters au grand cœur tel que Rocky Sullyvan (Les anges aux figures sales) ou de Patsy (The Mayor of Hell). Ralph fait preuve d'une violence et d'une cruauté sans vergogne. À l'image de cette scène ou après avoir frappé violemment un de ses complices, il le contemple en tournant la tête de manière à admirer son œuvre. De même, lorsqu'il frappe à coup de serviette Barbara Payton, rappelant le mythique écrasement de moitié de pamplemousse sur le visage de Mae Clark dans L'ennemi Public. Holiday Carleson (Barbara Payton) est d’ailleurs un personnage intéressant, prise dans les griffes de Cotter, par peur d’être seule et démunie elle entame une relation complexe qui lui procure des sentiments de peur, de haine et d’amour comme si elle développait un syndrome de Stockholm.


Si Le fauve en liberté est un film sympathique et bien rythmé, il n'est pas exempt de tout reproche pour autant. La mise en scène de Gordon Douglas manque un peu de générosité, le cinéaste préférant capitaliser sur le talent de James Cagney. De même, le scénario méritait d'être un peu plus épuré, notamment en ce qui concerne l’intrigue d’Helena Carter, peu intéressante à mon goût. Quant au dénouement, il aurait certainement gagné en audace en laissant une fin ouverte à son personnage principal, ça aurait été cohérent avec le pessimisme décrit dans ce métrage, mais peut-être un brin trop nihiliste ?

ChrisTophe31
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le 18 juil. 2019

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Chris Tophe

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