Le duel de trop
L’Histoire retiendra sûrement que la carrière de Ridley Scott a commencé avec des Duellistes et qu’elle s’est finie sur un Dernier duel… …un duel de trop. Alors oui, bien sûr, d’autres films du...
le 13 oct. 2021
89 j'aime
98
Le dernier duel de Ridley Scott est un poing en pleine face. Chaque scène rapproche le spectateur de ce moment éponyme, et délaisse peu à peu l'intrigue historique des gains et des conquêtes de bougons pour laisser flamber les valeurs bafouées de ces hommes promus de rang au prix du sang.
Ces hommes, qui se voient progressivement harponnés à la rudesse de l'acier trempé, au son fracas du devoir et de la pudeur, de l'estime à l'ardeur, du parjure à l'honneur. Chaque coup est porté pour tuer, pour écraser son rival.
Le rythme du film entier comme de cette scène est invraisemblablement infaillible, les mouvements exceptionnelement réalistes, si bien qu'on se retrouve à chercher dans ses souvenirs de cinéma un dénouement épique aussi peu édulcoré par les éléments de post-production pour un film de ce type.
On sent les os qui éclatent contre les murs et sous les montures qui s'écroulent, la peau qui se déchire sous le tranchant, la force émise dans les coups qui annoncent le glas à mesure que l'écuyer et le chambellan s'épuisent...
C'est juste hallucinant de justesse, le travail est spectaculaire, chaque élément est pensé pour rendre l'événement tangible jusqu'au concours de la brutalité amorcée par les personnages les plus dédaigneux (Adam Driver en Jacques le Gris et Ben Affleck en Pierre d'Alençon), face à celle du convaincu Jean de Carrouges (Matt Damon).
Les acteurs se dépassent dans leur rôle et font varier leur jeu selon le prisme des trois personnages principaux, sans jamais passer le cap de la satire; ils tiennent la bride de leur prestation, adoptent une posture qu'ils n'ont de cesse de nuancer pour correpondre à la vérité perçue de chacun, d'un même parjure.
Puis il y a l'instigatrice de ce duel, Margueritte de Carrouges, enclenchant la rancœur. Son interprête, Jodie Comer, dépeint avec une extrême justesse la misère sentimentale jusqu'à l'horreur charnelle, le dépit et le dégoût, l'épreuve émotionnelle de la femme acculée, privée de sa vertue, se risquant à la recherche de justice au péril de sa vie d'épouse et de bien plus encore.
La nouvelle pépite de Ridley Scott est une œuvre d'une rare intensité visuelle et narrative, et d'une qualité innatendue de mise en scène, qui laisse à songer aux thématiques puissantes révélées par les notions de statut, d'obéissance et de pouvoir.
Créée
le 13 oct. 2021
Critique lue 124 fois
D'autres avis sur Le Dernier Duel
L’Histoire retiendra sûrement que la carrière de Ridley Scott a commencé avec des Duellistes et qu’elle s’est finie sur un Dernier duel… …un duel de trop. Alors oui, bien sûr, d’autres films du...
le 13 oct. 2021
89 j'aime
98
Derrière une caméra, Ridley Scott n'a jamais fait son âge, tant presque chacun de ses films ressemble à une folie de jeune homme qui réussit à nous entraîner dans son monde. Et puis, il faut bien...
le 13 oct. 2021
75 j'aime
16
Premier plan d’ouverture : une femme se faisant habiller par ses servantes d’une robe noire, la caméra de Ridley Scott la filmant de dos avec pudeur et avec une forme d’austérité visuelle et musicale...
le 14 oct. 2021
74 j'aime
17
Du même critique
J’y allais en trainant les pieds. Je devais le voir, et j’y allais avec un tel degré d’appréhension qu’il me semble que n’avais encore jamais été à la fois aussi sceptique et excité en me faisant à...
le 26 déc. 2021
1 j'aime
Un moment succin qui dure, et dure, et crispe ! Le dernier duel de Ridley Scott est un poing en pleine face. Chaque scène rapproche le spectateur de ce moment éponyme, et délaisse peu à peu...
le 13 oct. 2021
Bien plus dégénéré et onirique que Grave, premier malaise accouché de Julia Ducournau qui traitait déjà de la fascination morbide de la carnation abîmée, Titane pousse les limites de la souffrance...
le 30 août 2021