Vanishing point était une course effrénée, entremêlant mouvement perpétuel vers l'avant et flashs back-rétroviseurs fixant l'arrière. Une course désabusée menant vers le mur et la mort.
Man in the Wilderness (le convoi sauvage) réalisé par Serafian la même année, est également rythmé par un double mouvement. Le mouvement impossible et absurde d'aller de l'avant, de fuir le quotidien et celui intérieur du retour aux sources.
Impossibilité d'aller de l'avant, c'est l'image de ce groupe de pirates-cow-boys tractant un bateau à travers les paysages arides et enneigés du Nord-ouest américain, toujours plus vers l'ouest, bercé par le désir rongeant de conquête. A leur tête, un capitaine se dresse à la proue, incarné par un John Huston décidemment hanté par l'esprit de Achab, l'eau ne les porte pas, elle a gelée, s'est cristallisée à l'image du rêve américain. Ces flibustiers terrestres sont moins attirés par l'avant que repoussés par l'arrière, poursuivis par d'autres corsaires, un groupe d'indiens, et par un fantôme.
Ce fantôme, Zack, était à la tête de leur expédition, mais lors d'une chasse, il s'est fait attaqué par un ours. Quasiment mort, ils l'ont laissés là, son corps jonchant le sol à la merci des indiens.
Mais peut être par miracle, lui qui pourtant a décidé de renier totalement Dieu et la religion durant son enfance, il va renaitre au seuil de la mort. L'eau, qui pour ses anciens compagnons s'est solidifiée et empêche leur avancée, va être pour lui source régénératrice.
Va s'entamer alors une lente marche agonisante, freinée par le froid, les blessures et la faim, une marche d'abord rythmée par un désir de vengeance. Cette renaissance, car s'en est une, n'est pas seulement la conséquence de l'eau, celle-ci n'est qu'un vecteur, son retour parmi les vivants, retour lent et pénible, est lié à la mémoire, à des souvenirs qui lui reviennent et un passé qu'il avait un peu négligé. Ainsi son réveil est déclenché par un flash back dans lequel on le voir enfant au chevet de sa mère morte. Orphelin il est recueilli alors par le capitaine, celui qui est à la tête du navire, celui-là même qui vient de l'abandonner comme un chien. Ce flash back en appellera d'autres, essentiellement lié à une compagne décédée et l'enfant, le sien cette fois-ci, qu'il a abandonné.
Le swimmer Burt Lancaster était un homme droit qui s'écroulait au fur et à mesure qu'il se rapprochait de son objectif, « I'm swimming home ». Zack entreprend le chemin inverse. Il n'est plus rien, un mort-vivant, rampant sur le sol, perdu dans une nature hostile. Au contraire du swimmer, lui se redresse, renait et repart de l'avant, un avant qui est un retour. « I return at home ». On déplace alors l'objectif, l'envie de découvrir, de conquérir et où l'on semble se fourvoyer, se transforme en une envie de revenir a ce que l'on possède, à soi même et aux siens, découverte tout autant mystérieuse et aventureuse.
Ce geste d'avancée vers l'arrière, n'est pas de tout repos, il faut lutter, survivre, réapprendre.
Ainsi le western et l'ouest s'éloigne, la piraterie ne vogue plus vers des horizons sans fins, on reste ancré au sol, et le film prend la forme d'un survival métaphorique dans lequel la survie et la lutte est autant extérieur qu'intérieure. Un survival peuplé d'images incroyables, ours, loups, lapin blessé, femme indienne qui accouche au bord de la rivière, navire incongru flottant sur la neige.
Teklow13
8
Écrit par

Créée

le 13 févr. 2012

Critique lue 399 fois

9 j'aime

1 commentaire

Teklow13

Écrit par

Critique lue 399 fois

9
1

D'autres avis sur Le Convoi sauvage

Le Convoi sauvage
SanFelice
7

L'autre Revenant

Une expédition de trappeurs, un guide grièvement blessé par un ours et laissé pour mort par ses camarades, en plein conflit entre Blancs et Indiens : en ce mois de février 2016, lorsque l'on réunit...

le 11 févr. 2016

36 j'aime

Le Convoi sauvage
guyness
8

Man vs Wild, saison 1820

Les premières secondes du "convoi sauvage" ("Man into wilderness" in the text), sont explicites. Tout de suite, on sait qu'il ne s'agira pas d'un western classique, par l'époque et le...

le 6 août 2011

35 j'aime

5

Le Convoi sauvage
Sergent_Pepper
8

La course ou la vie.

Commençons par régler l’épineuse question du lien entre Le convoi sauvage et The Revenant, qui tous deux présentent la destinée de Hugh Glass, (ici rebaptisé Bass), trappeur en proie à l’hostile...

le 15 nov. 2016

27 j'aime

Du même critique

Amour
Teklow13
8

Critique de Amour par Teklow13

Il y a l'amour qui nait, celui qui perdure, celui qui disparait, et puis il y a celui qui s'éteint, ou en tout cas qui s'évapore physiquement. Si certains cinéastes, Borzage, Hathaway, ont choisi de...

le 22 mai 2012

88 j'aime

11

Mud - Sur les rives du Mississippi
Teklow13
5

Critique de Mud - Sur les rives du Mississippi par Teklow13

J'aime le début du film, qui débute comme un conte initiatique. Nichols parvient à retranscrire d'une jolie façon le besoin d'aventure, de mystère, de secret que l'on peut ressentir durant l'enfance...

le 31 mai 2012

56 j'aime

4

Les Amants passagers
Teklow13
2

Critique de Les Amants passagers par Teklow13

Le film possède une dimension métaphorique et repose sur une image politique plutôt intéressante même si déjà rabattue, à savoir assimiler un avion à la société actuelle, en premier lieu la société...

le 26 mars 2013

55 j'aime

4