Le Comte
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Le Comte

Film de Pablo Larraín (2023)

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Naturellement, notre cher comte a goûté au sang humain des quatre coins du monde. Le sang anglais est son préféré, bien sûr. Il dit qu'a quelque chose de l'Empire Romain. Une note de peau de Viking. Dur à définir. C'est un sang amer et foncé. Malheureusement le comte a aussi goûté au sang d'Amérique du Sud, au sang des travailleurs. Il ne le recommande pas. Il dit qu'il est âcre et a un nez de chien. Un bouquet plébéien qui lui reste sur les lèvres et le palais des semaines. Cette mascarade à commencé il y a des siècles, en France bien sûre.

La narration et la diction "very british" de Stella Gonet (et non pas de la très vampirique Tilda Swinton comme je le pensai) tout en hauteur ironique nous lance tout de suite dans le récit d'une idée géniale. Pinochet anciennement Claude Pinoche est un vampire, immortel ou presque et il continue ses macabres boucheries nocturnes depuis une île déserte et misérable qui lui sert de sanctuaire à lui et ce qui reste de la cour de l'époque de son sombre règne dans les années 70 et 80. Parce que oui, Pinochet à perdu ses dernières responsabilités politique en 1998, c'est de l'histoire très récente, et très présente au Chili comme on a pu le voir lors de l'élection présidentielle de 2021 ou sur l'opposition entre José Antonio Kast et Gabriel Boric se rejouait encore l'héritage de la période de la dictature militaire. Pablo Larrain se lance donc dans un projet satirique mais aussi mémoriel, celle de son pays, le Chili et d'un période déja traité dans ses premiers films Tony Maneiro (2008), Santiago 73, post mortem (2010) et peut être le film qui l'aura fait découvrir hors de ses frontières, No (2012).

Ce siècle m'est étranger et pour vous je suis la vie éternelle.

Abordé un sujet aussi lourd ce fera donc sous l'angle de la satire, celle du film de vampire avec tous les incontournables du genre, l'ennui de l'immortalité, le manoir, le serviteur, la visiteuse (faussement) ingénue avec en prime un joli travail sonore, le vent, les pas, les grincements de portes. Un récit de genre donc, finalement presque un peu classique avec deux grands moments à mes yeux. Une introduction brillante et virtuose, portée par le "Cold Song" d'Henry Purcell et un épilogue sanglant ou la narration apporte un nouveau ressort au scénario avec l'apparition d'un personnage qui finalement ne révolutionnera pas le récit initial. Un épilogue morbide accompagné par la musique d'Arvo Part déjà brillement utilisé dans "El Club" film, un peu méconnu avec qui ce nouveau long a beaucoup en commun : un très bel usage du noir et blanc, la plage, et des hommes face au bilan de leurs crimes. Entre, il y a la trame, quelques longueurs certes et une intrigue principale un peu secondaire parfois avec des allures de huits-clots voir d'un récit d'Agatha Christie. Les protagonistes, les enfants cupides, la none impitoyable et machiavélique, le serviteur et la mère, alliés de circonstance bataillent autour de la recherche de l'héritage d'un patriarche tout de même bien vivant. Une seule issue, le carnage et la fuite.

Entre deux biographies aussi rentables que brillantes, Pablo Larrain s'offre son film indé, un peu pastiche de film de genre à la manière d'un Jim Jarmusch, un peu grand récit politique. Le film ne choisit jamais vraiment son camp et c'est peut être très bien comme ça, Larrain est un grand cinéaste de l'image et peut importe le sujet, les images seront magnifiques. Ce n'est pas la claque féministe et jubilatoire d'Ema (2019) mais une satire brillante et originale. Et puis il y a une scène, il y avait le règlement de comptes biblique dans El Club, il y avait l'introduction de Jackie avec la narration grandiose de Nathalie Portman, il y avait le final troublant de Ema. Pablo Larrain arrive toujours à imprimer quelques choses dans nos rétines et cette fois ce sera par un envol, une danse aérienne et marine, toute en volupté, l'accès d'un être à l'immortalité. Magnifique moment de grâce avant le retour sur terres.

fran1011
7
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le 23 déc. 2023

Critique lue 5 fois

fran1011

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