N'est pas Hitchcock qui veut

L'amour et les forêts nous propose de suivre le parcours d'une femme qui va sombrer dans une relation toxique sur plusieurs années, enfermées avec un homme qui se présente comme le parfait compagnon, mais qui va s'avérer être le pire des maris nocifs. J'attendais de voir comment la réalisatrice nous plongerait progressivement dans une relation qui s'effrite et comment elle nous ferait vivre la détresse de cette femme prisonnière. Sauf que ça ne marche pas du tout. La mise en scène est d'une paresse abyssale. À part faire mumuse avec la couleur rouge, Valérie Donzelli se cantonne à montrer un vilain mari qui devient de plus en plus cinglé. Et c'est à cause de lui que le film plonge complètement. Le personnage est abominablement mal écrit. Il est toujours dans l'excès, parle comme s'il était dans une tragédie grecque. Tous ses dialogues scient les oreilles. Il n'y a rien de naturel. Le premier degré du film le rend risible. On voit donc le pauvre Melvil Poupaud se comporter de la manière la plus clichée possible : il appelle tout le temps, il vérifie les comptes, il harcèle de questions, il fait du chantage (et encore)... Il y a même un plan ridicule où il passe en voiture devant le travail de Virginie Efira avec un regard de mec trop louche. C'est filmé avec un premier degré et des effets ridicules car la réalisatrice est persuadée de faire un gros thriller. Le film est tellement cliché que Virginie Efira est à poil au bout de 10 minutes.

Mais en vrai, pourquoi pas ? Ca doit exister ce genre de comportement. Cependant c'est montré de manière tellement formelle, appliqué tel quel, jeté à la face du spectateur que ça en perd toute vraisemblance. Et donc on n'y croit pas. C'est tellement peu viscéral que la réalisatrice a recours à la voix of pour expliquer textuellement la détresse du personnage de Virginie Efira. Je ne veux pas entendre "j'avais très peur de mon mari", je veux le ressentir ! D'ailleurs le film perd tout suspense car l'histoire est racontée par Virginie Efira sous la forme d'un entretien avec son avocate. On sait qu'elle va s'en sortir. Cet entretien est tellement sérieux qu'on a envie de savoir comment on en est arrivé là. Vu la lourdeur du ton du film et la musique bien sombre pour te faire comprendre que c'est très grave (parce que t'es trop con pour comprendre une situation, il te faut une musique en plus pour comprendre que c'est trop horrible) on se dit qu'il y a eu des agressions, des morts peut-être. Sauf que non, son mari est juste un gros casse couille, et ils se bagarrent un peu à la fin.

On a aussi plein d'occasions manquées comme les enfants du couple. Ils sont là, on dirait que tout le monde s'en fou alors que ça aurait été un putain de levier sur lequel jouer. Même Efira semble s'en moquer de ses enfants. On se demande vraiment pourquoi elle reste aussi longtemps avec son taré de mec. En plus elle n'est pas si dépendante de lui. Elle a un travail, donc elle est indépendante financièrement. On nous fait croire au début qu'elle est réservé, mais pas tant que ça en fin de compte. La meuf finit même par se trouver un amant en deux swipe sur Tinder. Ca aurait été intéressant de jouer avec une femme peu confiante, réservée, esseulée, qui a peur d'une solitude mortifère et qui doit choisir entre rester avec le seul homme qui s'est intéressé à elle et la solitude, mais non... Donc tout devient mou, la confrontation finale est molle, le plan pour évacuer les enfants est mou, c'est réglé en deux secondes. Ce qui est fou c'est que le film est co écrit par Audrey Diwan qui a fait L'événement et qui est un chef d'œuvre !

On sent aussi que la réal et la scénariste a voulu mettre le plus de trucs du roman, mais c'est jeté comme ça, sans raison. À quoi sert la jumelle de Virginie Efira ? À quoi a servit la femme qui partage la chambre d'Efira à l'hôpital ? On ne sait pas, mais c'est là en tout cas.

Bref, ce film était un calvaire.