Ah Bébel… tout un poème… On se demande à quel moment il a arrêté de cabotiner avec humour pour s’enfoncer dans ces rôles désabusés et gras qui ont rempli les années quatre-vingt de leur ombre nauséabonde… S’il n’y avait pas dans les années qui suivent les merveilleux ou sympathiques Magnifique, Incorrigible et Guignolo on pourrait penser que c’est justement avec ce film que Belmondo laisse tomber la légèreté qui lui allait si bien pour la lourdeur qui ne va à personne.


Ici, remake de Un nommé La Rocca par Giovanni, l’auteur-scénariste du précédent qui, visiblement mécontent du travail de Becker junior, décide de donner de sa personne pour mieux faire sentir la vérité franche et virile de ces amitiés de la pègre marseillaise des années trente…


Autant dire d’emblée que ce n’était pas une bonne idée, tant l’amateurisme de Giovanni-cinéaste confine ici à l’embarrassant…


Pourtant, le bougre a déjà tâté de la caméra, il reprend Bébel dans le même rôle et nous offre Claudia Cardinale en prime, normalement, personne ne peut rater un truc pareil en 1972… et pourtant…


Dès les premiers plans, brouillons, mal cadrés, approximatifs, d’une photographie douteuse et posant des acteurs mal dirigés dans des situations invraisemblables, on abandonne tout espoir devant la bobine et l’avenir nous donne hélas parfaitement raison, comme à son ordinaire.


L’histoire, parfaitement idiote n’est jamais justifiée et part dans tous les sens sans plus de raisons, Bébel vient enquêter sur un crime imputé à son ami d’enfance qui, pour une fois, en est innocent, en deux temps trois mouvements il salope le travail, devient baron de la pègre sous le surnom qui donne son titre au film et envoie son ami au bagne non sans le rejoindre assez vite lorsqu’une bande d’afro du Harlem 70s viendra foutre le bronx sur le vieux port de 1934…


Avec une absence remarquée de la construction cinématographique, Giovanni nous offre un tiers de son film en prison et c’est d’ailleurs le moins mauvais, finalement, la taule, le type connait mieux ça que la pègre ou le cinoche et puis, ça laisse moins d’occasion pour faire des bêtises, du coup, ça se regarde presque, même si Constantin a un rôle trop gros pour lui et que Bébel est à demi casse-couilles quand même…


Et là, c’est amusant, on se dit, mais oui, tiens ! Ca faisait quoi d’être bagnard dans les années trente et de se faire libérer bien après la guerre en passant l’Occupation à l’ombre ? D’où le minuscule intérêt de cette partie…


Après, ça se termine comme ça peut, c’est un peu interminable, Bébel redevient parrain du milieu en deux heures, mais à Montmartre cette fois, pas plus intéressant que ça d’ailleurs, tout le monde tire la gueule pour bien montrer que c’est une histoire désespérante et tragique mais le spectateur s’en bats l’œil et s’ennuie à crever faute de personnages ou de situations acceptables…


A un moment on découvre notre Gérard (inter)national deux ans avant les valseuses, ça fait anachronique, comme le rôle de Bébel, on se croirait dans un naveton du début des 80s, un film précurseur en quelque sorte…

Torpenn
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le 17 févr. 2014

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Torpenn

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