Petit coup de cœur pour ce film suédois de Dreyer, magnifiquement restauré, qui permet de détourner de manière subtile et soulignée l'image d'austère danois qui peut lui coller à la peau. S'il ne s'agit pas d'une comédie au sens où on l'entendait majoritairement à l'époque (pas de comique de répétition, pas de gags de cirque, etc.), il est vraiment très intéressant de voir comment on se plonge dans ce petit village du XIIe siècle (ni suédois, ni danois, mais norvégien, pour faire le tour des pays scandinaves) aux côtés de Sofren, un jeune pasteur devenu par tradition le mari d'une vieille femme, celle de son défunt prédécesseur. Le problème et principal carburant du film, c'est qu'il est amoureux de sa maîtresse (il ne savait pas qu'on allait lui coller une mamie de 80 ans en devenant pasteur) et qu'il la fait engager au couvent comme aide, sous prétexte que ce serait sa sœur. Le protagoniste cherchera à de nombreuses reprises à éliminer sa femme pour vivre tranquille avec sa dulcinée, le long d'un chemin jalonné de séquences presque potaches où l'homme particulièrement impertinent (et impénitent) essaie de passer du temps avec son amante.


La reconstitution de l'ambiance du petit village norvégien est vraiment envoûtante, avec tout ce qui avait trait à la vie quotidienne et que l'on croise dans les films de Mauritz Stiller ou Victor Sjöström, les maîtres de Dreyer : les lits imposants en bois, la broderie, les vieux habits, les interdits, etc. Quelques gags qui semblent sortir d'une autre dimension, comme lorsque Sofren essaiera de faire littéralement mourir de peur sa vieille femme en se déguisant en diablotin — pas de bol, on voyait ses pieds, ce qui la fera beaucoup rire. Pendant longtemps le personnage féminin antagoniste sera symbole de dureté et d'austérité, pour se révéler in fine plein de douceur et même emplie de pardon. Beaucoup d'humour, donc, avec une observation minutieuse et malicieuse de la vie rurale d'alors — une verve comique que je ne connaissais absolument pas chez Dreyer. J'ai également beaucoup aimé l'interprétation derrière le personnage de Dame Marguerite, avec Hildur Carlberg (77 ans) pleine d'humour et d'autorité.


http://www.je-mattarde.com/index.php?post/La-Quatrieme-Alliance-de-Dame-Marguerite-de-Carl-Theodor-Dreyer-1920

Créée

le 19 janv. 2022

Critique lue 80 fois

4 j'aime

Morrinson

Écrit par

Critique lue 80 fois

4

D'autres avis sur La Quatrième Alliance de dame Marguerite

Du même critique

Boyhood
Morrinson
5

Boyhood, chronique d'une désillusion

Ceci n'est pas vraiment une critique, mais je n'ai pas trouvé le bouton "Écrire la chronique d'une désillusion" sur SC. Une question me hante depuis que les lumières se sont rallumées. Comment...

le 20 juil. 2014

142 j'aime

54

Birdman
Morrinson
5

Batman, évidemment

"Birdman", le film sur cet acteur en pleine rédemption à Broadway, des années après la gloire du super-héros qu'il incarnait, n'est pas si mal. Il ose, il expérimente, il questionne, pas toujours...

le 10 janv. 2015

138 j'aime

21

Her
Morrinson
9

Her

Her est un film américain réalisé par Spike Jonze, sorti aux États-Unis en 2013 et prévu en France pour le 19 mars 2014. Plutôt que de définir cette œuvre comme une "comédie de science-fiction", je...

le 8 mars 2014

125 j'aime

11