Au-delà de la mise en scène à la fois sobre et stylisée de son réalisateur Rupert Wyatt, Rise of the Palnet of the Apes vaut surtout pour son scénario, un modèle d’équilibre signé Rick Jaffa et Amanda Silver (mieux inspirés que pour Jurassic World). Ce récit initiatique et quasi-biblique condense en effet de façon remarquable les genres du film carcéral et du film révolutionnaire tout en tenant du meilleur de la science fiction. En commençant d’ailleurs par le film original de 1967, La Planète des singes, puisqu’il il en raconte la genèse.


Et Rise of the Planet of the Apes ne se contente pas de faire des clins d’œil astucieux à son illustre ancêtre (à l’image de cette scène où César joue avec un modèle réduit de la Statue de la Liberté). En tant que prequel racontant ce qui précède l’histoire originale, le film de 2011 pose les jalons de la mythologie que celui de 1967, et ses suites, avaient fondé. Dans celles-ci, il était dit que le premier mot prononcé par un singe avait été un « Non », à l’adresse d’un homme. Et ce tout premier acte de rébellion est ici illustré comme l’acte fondateur de la révolution du Singe contre l’Homme. Mais Rise of the Planet of the Apes reprend aussi le film original en inversant les positions et les points de vue. Dans le film de Franklin J. Shaffner, les hommes était traqués comme des bêtes et traités comme des esclaves par les singes. Cette fois, les rôles sont inversés dés la séquence d’ouverture ou lorsque les singes affrontent la police montée. Enfin, le film de Rupert Wyatt s’inscrit dans la lignée de son illustre prédécesseur parce que, comme lui, il fait écho aux peurs de son époque. La guerre atomique était une de celles de la période de la Guerre Froide, et La Planète des Singes - outre sa critique de l’anthropocentrisme - l’illustrait de façon marquante (cf. la cultissime scène finale). De la même façon, le film de Rupert Wyatt reflète la peur actuelle d’une pandémie mondiale (cf. la dernière séquence elle aussi très marquante). En ce sens, le film révèle une autre référence cinématographique : le film catastrophe où, comme dans 28 jours plus tard, l’humanité s’autodétruit en créant un virus qui la dévaste.


Mais Rise of the Planet of the Apes tient aussi de trois autres genres et films qui, chacun, nourrissent un des trois actes du film. Le premier acte évoque le mythe du monstre Frankenstein. Comme le docteur Frankenstein, Will Rodman commet le péché d’hybris : il joue à Dieu en outrepassant les lois de la nature. Et comme pour le monstre de Frankenstein, la tragédie de César, le singe intelligent « créé » par Will Rodman, est de ne pas être un véritable humain. Car sa différence nourrit bientôt la peur de l’Homme qui l’enferme alors avec d’autres singes. A partir de là, le film entre dans son deuxième acte qui tient, lui, du film carcéral (genre auquel appartient déjà le premier film de Wyatt). Tous les codes du genre y sont présents. Le personnage est d’abord victime de sa méconnaissance des règles en vigueur dans ce milieu, puis les apprend pour finalement s’en servir. Alors, connaissant le même sort que ces congénères, César prend conscience de sa véritable identité de Singe. Et le film bascule dans son troisième acte tenant autant des Dix Commandements que de Spartacus ; le premier pour l’exode que César mène, et le second pour la dimension révolutionnaire de sa rébellion. Comme Moïse, César tire profit de sa double identité - il est un singe élevé comme un homme - , et comme Spartacus, il se révèle le leader d’une « révolution » contre le joug des plus puissants. Et l’on peut assimiler la traversée du Golden Gate à la traversée de la Mer Rouge, sachant que, à l’instar de Moïse, César guide son « peuple » vers sa liberté.


Mais tout ceci n’aurait pas été possible sans la prouesse technologique de la motion capture (rebaptisée depuis performance capture) : le procédé qui a donné naissance à Gollum, King Kong (version 2005) ou encore à Avatar. La véritable révolution du cinéma en ce début de siècle est peut-être plus ici que dans la 3d relief. Et surtout, il faut louer la performance d’Andy Serkis (déjà derrière Gollum et Kong) qui fait de César un personnage aussi convaincant que juste.


In fine, cette nouvelle Planète des Singes n’est peut être pas le monument de 1967. Mais elle en est un digne héritier, autant pour ces effets spéciaux que pour la force de son histoire.

Toshiro
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le 20 déc. 2014

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