Sans se différencier du film d’adultère classique, une constante dans le cinéma français, le film d’Héloïse de laisse voir grâce à ses acteurs, plein de charme et d’énergie. Le film n’est pas parfait mais il se regarde sans déplaisir, ni ennui.
Chiara vit sur une île de la côte atlantique, là où son mari Antoine a grandi. Ils forment un couple heureux et amoureux. Elle a appris le métier d'Antoine, la pêche, et travaille à ses côtés depuis vingt ans. L'arrivée de Maxence, un nouvel apprenti, va bousculer leur équilibre et les certitudes de Chiara.
Sur le thème de l’adultère, il est permis de préférer ‘La femme infidèle’ de Claude Chabrol qui est personnellement un de mes films préférés. Le cinéaste choisissait un angle particulier puisque l’adultère de l’épouse rapprochait, au lieu d’éloigner, le mari et la femme. Le film était d’ailleurs centré sur le couple légitime plutôt que sur le couple adultère. Dans son film, Héloïse Pelloquet fait l’inverse. Elle centre son film sur le couple d’amants et éloigne le mari qu’elle envoie en négociations commerciales en Angleterre.
L’approche de la réalisatrice est donc beaucoup plus classique. On passe par les jalons usuels de l’adultère : la séduction, la première fois, la culpabilité qui s’ensuit. La femme mariée tente d’oublier, mais une fois que la barrière est franchie, impossible de renoncer jusqu’à l’inéluctable découverte de l’adultère par les autres et la malveillance qui en découle. Rien de neuf sous le soleil donc, mais tout cela est assez bien fait. En fait, la plus grande réussite du film est son duo d’acteur.
Cécile de France est parfaite dans ce rôle. Elle à la fois belle et un peu usée par la vie et son travail. Elle est assez dirigiste mais faible quant à ses sentiments pour le jeune Maxence. Elle se donne corps et âme dans son rôle, comme son personnage dans l’adultère. Face à elle, Félix Lefebvre (vu dans ‘Eté 85’ de François Ozon) est vraiment bien. Il a l’assurance de la jeunesse, l’arrogance de l’idéaliste. Il a beaucoup de charme et de présence. On comprend qu’elle craque. Si l’opposition des deux personnages est un peu trop marquée (lui est jeune, elle a la quarantaine, il vient d’un milieu aisé, elle vient d’un milieu plus modeste et est d’origine étrangère), le couple est crédible et marche plutôt bien.
Il me semble qu’il y a tout de même une petite erreur scénaristique. La liaison ne démarre pas tout de suite et il me semble que le film aurait gagné en efficacité à s’ouvrir avec l’adultère déjà entamé et acquis pour le spectateur. En fait, le film s’ouvre sur des séquences de pêches, de travail en mer. On voit ce couple et son apprenti bosser. Sans être tout à fait documentaire ou néo-réaliste au sens où le cinéma italien l’entendait, on y croit, on sent la sueur et la cinéaste montre assez bien la vie de cette communauté de pêcheurs, de ce petit microcosme. Mais étonnamment, la réalisatrice peine à faire exister cette communauté, une fois la liaison établie. La cinéaste échoue un peu à faire coexister les deux tendances du film (le naturalisme social et les sentiments).
La photographie du film est assez belle, légèrement granuleuse et bleutée. Elle met parfaitement en valeur la mer, l’île et contribue à créer cette image de bulle dans laquelle vit cette communauté de pêcheur. La mise en image des séquences est inégale. La séquence final entre l’épouse et le mari est un peu nunuche. D’autres scènes auraient pu être davantage mises en valeur, notamment celle du mariage à l’église ou cours de laquelle Maxence joue du hautbois et Chiara semble craquer et passer un cap.
Malgré les réserves que j’ai pu exprimer dans cette critique, le film est conseillable pour ceux qui ne s’attendent pas à voir un chef-d’œuvre mais qui souhaite savoir à quoi ressemble la Bovary d’aujourd’hui.