On ne peut pas dire que "Blood Tracks", son titre original, ait été gâté pour son adaptation française, avec ce titre sans liens avec le sujet et cette affiche générique qui jure avec le contenu du film, son cadre enneigé et sa menace.


Dans un film d'horreur il faut une menace, qu’elle prenne figure humaine, animale, extraterrestre ou autre bizarrerie. Ses origines sont le plus souvent expliquées, mais sans jamais veiller à créer une compassion qui serait malvenue pour le croquemitaine. Il doit faire trembler et si possible parce qu’il est méchant.


Pour Blood Tracks, l’introduction présente cette menace, une famille en fuite avec une mère et quatre enfants après avoir tué leur père alcoolique et violent. Ce sont des victimes. Mais leur isolement pendant une dizaine d’années va accentuer leur paranoïa et leur sauvagerie, vivant reclus dans une usine désaffectée en pleine montagne. Seul le frère aîné semble avoir conservé sa raison. Mais il sera bien impuissant à juguler la violence de cette famille quand des étrangers vont perturber leur foyer précaire.


L’idée était intéressante, mais elle est trop rapidement mise sous le tapis pour lui préférer une sauvagerie aveugle. La nuance aurait pu s’installer, le film aurait pu raviver le souvenir d’une fratrie déboussolée mais préfère rester trop longtemps dans le cliché de la menace sauvageresque. Quand il s’agira de tendre la main, il sera trop tard.


Ces étrangers sont bien différents, purs produits d’une génération MTV, et l’idée une fois encore a du potentiel, puisqu’il s’agit d’un groupe de rock venu filmer un clip en pleine montagne, accompagné de l’équipe technique et des danseuses. Le réservoir de victimes potentielles est large, mais le film prendra son temps avant de puiser dedans, préférant respecter une autre des règles du film d’horreur, la moitié du film pour présenter les personnages, l’autre pour les trucider.


Il y aura bien quelques fausses pistes pour créer un peu de tension pour patienter, mais elles tourneront surtout autour de l’avalanche qui les a bloqué dans un chalet et bien sûr trop près de cette usine où la famille de crétins des Alpes se cache.


Cela pourrait sembler longuet dans d’autres productions, mais cette attente permet de découvrir un microcosme assez particulier avec le groupe de rock et l’équipe de tournage, à la fois détendu et bosseur, selon l’un ou l’autre et selon les occasions. Quelques personnages sont mis en avant, mais c’est une poignée parmi la fourmilière observée, au point que quand les morts commenceront à s’empiler, il sera parfois bien difficile de déterminer qui a été la victime.


Le groupe en question est d’ailleurs réel, il s’agit du suédois Easy Action, peu de temps de temps avant sa dissolution quand son leader avait rejoint Europe. Groupe de “glam metal”, il est difficile de ne pas pouffer devant leurs perruques bouffantes et leurs tenues colorées tandis que les danseuses du clip arborent des tenues elles aussi très datées. Mais leurs deux chansons rock FM pour le film sont entraînantes, tandis que le reste de la bande son au synthétiseur se révèle assez réussie. Le réalisateur aurait fait boire tout ce petit monde à grands renforts de bières avant leur prestation, ce qui explique certainement leur décontraction bien innocente devant la caméra.


Eux aussi passeront à la moulinette des morts, sans forcément une fois de plus bien comprendre qui a été tué. La réalisation du suédois Mats-Helge Olsson, grand habitué du film de série B entre la Suède et les États-Unis, n’est pas vilaine, en tout cas elle reste acceptable même si pour la deuxième partie de l’aventure cela devient bien plus confus. Dommage qu’avec de tels décors, ces montagnes enneigées ou cette usine désaffectée, les plans ne les mettent pas en valeur. Mais la version vue, en double DVD avec L’Armée des damnés, était franchement cracra, ce qui n’aidait en rien.


Blood Tracks n’a donc rien d’une pépite, mais reste malgré tout un film de série B qui tente de changer quelques ingrédients mais sans révolutionner la recette. Il est avant tout une petite curiosité, et s’appréciera pour ça et sans qu’elle ne soit trop déplaisante à découvrir.

SimplySmackkk
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le 19 juin 2021

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