Voici un film magnifique, comme on aime, en double ou triple détente, qui tape sur tout le monde avec jubilation et second degré. Le pitch est (en 1967, 3 ans avant le Hey Jude des Beatles qui est un appe au vicel ) que le président des États-Unis a besoin d'un psy à qui se confier, lequel ne pourra lui même se confier à personne, ce qui le rendra paranoïaque (plus fin que dingue) et le conduira à la fuite au travers des prémisses de mai 68. James Coburn incarne brillamment ce psy qui embrasse avec enthousiasme les thèses les plus absurdes, les plus absconses, de son époque. Et qui dans ce film sont des plus logiques. On parle d'un Ovni.
On est avant mai 68 mais on comprend comment c'est arrivé, le monde avait besoin de liberté.
Le réalisateur, Theodore J. Flicker a débuté dans les années 50 comme comédien d'improvisation. Il met ensuite en scène à Broadway The Nervous Set de Scott Miller. En 1974 il co-crée la sitcom Barney Miller à l'antenne jusqu'en 1982 sur ABC.Il était l'oncle de Jonathan M. Flicker, réalisateur de Followers (2000). Là se perd sa trace. Pourtant le film porte une signature punk évidente 10 ans ou presque avant le mouvement, en plus d'être totalement déjanté il est absolument visionnaire toujours avec l'ironie de ceux qui anticipent sans pouvoir, il remet en question dès ses premières minutes la prévalence du patriarcat en prêtant au héros une compagne qui se prétend soumise mais refuse le mariage et se révèle être une espionne. Ensuite il emmène ce psy au bout de ses contradictions réactionnaires et l'oblige à s'accomplir à la marge, avec des musiciens hippies, Le monde de l'espionnage en prend pour son grade, cela frise le grand guignol avant de comprendre que le film est à tiroirs. On y pastiche avec saveur le libéralisme, le capitalisme et même le communisme ( un espion russe prétend qu'il exerce ce métier par ce que c'est le refuge des derniers romantiques). Il est difficile de ne pas spolier la fin tant elle paraît d'actualité : on apprend que le monde fait l'objet d'une sorte d'OPA de la part des sociétés de communication qui nous cablent pour mieux nous voir nous ébattre, nous débattre dans notre humanité. On y trouve une sorte de fatalisme triste qui rapproche du sentiment de la vacuité de l'âme tant qu'elle se contente de technologie, non de progrès. Brave New world d'Huxley était déjà d'actualité.

Prunzy
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le 24 déc. 2021

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