Si Cocteau sait soigner ses costumes et ses décors, bien que les maladresses ne soient pas rares, pour le reste c'est le zéro pointé. Niveau réalisation, il ne fait rien de son cadre, se contente de poser mollement sa caméra sans même effectuer de travail convenable sur la lumière. On peut arguer que c'est l'époque mais ça reste foutrement à la ramasse, il suffit de voir ce que faisaient Kurosawa, Welles, Huston ou même les néoréalistes italiens à la même période. Cela suffit amplement à montrer que le manque de moyens ou les contraintes techniques ne sont pas la principale cause de ce fiasco. Sans compter que Cocteau nous sert des gros plans par dizaines sur le ridicule faciès empaillé de sa Bête, avec son air ahuri et son regard bovin. Sachant qu'en plus la voix de son atroce épouvantail est celle d'un stalker emo, comme celle de ce type, ce qui n'arrange rien. Mais où est le caractère bestial de son personnage, si ce n'est qu'uniquement en surface ? Il n'a certainement jamais appris qu'il valait mieux ne pas montrer que mal montrer. Par contre, la bonne utilisation des focales et de la lumière, ça, il ne connaît apparemment pas au-delà de quelques clairs-obscurs réussis. Il se veut cinéaste mais ne reste qu'un esthète apparent et tout à fait superficiel.


Alors, ayant entendu parler du Cocteau poète, du Cocteau dramaturge, je me suis dit que les dialogues par contre, ça devrait le faire et donc rentrer dans ses compétences. Que nenni. C'est d'une vacuité, d'une mollesse et d'une indigence crasses. Les dialogues sont effroyablement banals, sans le moindre travail d'écriture un tant soit peu sérieux. Alors si l'on rajoute en plus la direction d'acteurs absolument calamiteuse avec un Jean Marais en insupportable geignard et l'autre Josette complètement truffe on obtient véritablement un grand cru de l'abjection cinématographique. Si Cocteau arrêtait de mettre son mec dans ses films en pensant savoir l'utiliser et le filmer, ce qu'il ne sait apparemment pas faire, ce serait déjà bien mieux. Au lieu de s'extasier sur ses beaux yeux, peut-être qu'il nous ferait du cinéma. Mais encore faudrait-il qu'il comprenne que carton-pâte et poésie ne sont pas synonymes. Les décors doivent être au service du film, et non le contraire. Filmer son jules dans un décor et faire du cinéma, ce n'est pas vraiment du même ordre. Certains y verront de la féérie, de la poésie, voire, soyons fous, de la beauté alors qu'il s'y trouve seulement lourdeur et niaiserie. Je ne sais pas s'il est bon poète, mais en tout cas il se trouve être piètre cinéaste.


Comme quoi, il suffit d'accoler le nom de Cocteau à un film pour faire gober n'importe quoi à un cinéphile.

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le 17 nov. 2015

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Brad-Pitre

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