Encore un film qui a quasiment disparu des écrans radars et qui n’a, d’ailleurs, jamais rencontré un franc succès. C’est curieux car le résultat est vraiment une réussite. La reconstitution de l’époque coloniale est soignée, la photographie est sublime et il baigne tout au long du film une ambiance onirique des plus pertinentes. Adaptée d’une histoire vraie sur des lions mangeurs d’hommes, le pitch évoque Les Dents de la mer avec des animaux ayant le goût du sang, un protagoniste entraîné dans une quête dont l’obsession finit par le dépasser, et un chasseur professionnel aguerri mais impressionné par la violence qui anime les bêtes. La proie devient le chasseur et le chasseur la proie dans un ballet élégant qui tutoie le fantastique. Entre sa narration off qui évoque un épisode légendaire et des choix de réalisation intelligents (les lions filmés comme des ombres et les gros plans sur leurs yeux), le film évite de se casser le nez sur l’autel du réalisme même s'il doit y céder davantage sur la fin.


Le récit, quant à lui, est bien mené. Il ne tourne pas en rond comme on pourrait le craindre et sait rebondir à travers des péripéties intelligentes et des personnages intéressants à défaut d’être passionnants. En baroudeur pas aussi fanfaron qu’on pourrait, de prime abord, l’imaginer, Michaël Douglas est à son aise. Val Kilmer incarne un ingénieur touche-à-touche qui s’improvise en un chasseur de talent tout à fait crédible même si son personnage aurait gagné à être plus approfondi. Un brin de folie ou une dimension obsessionnelle, par exemple, auraient certainement apporté davantage à l’ensemble. Mais s’il ne creuse pas certains aspects, le film les gomme par ses images crépusculaires et son ambiance cauchemardesque.


La dernière ligne droite du film mise davantage sur l’action alors qu’il évoquait jusque-là plutôt la menace d’une nature incontrôlable sur une civilisation coloniale qui pense pouvoir triompher de tout. Le message de l’ensemble est, en ce sens, un peu trouble. Contrairement à ce que beaucoup lui reprochent, il ne décrit cependant pas, à mon sens, la supériorité de l’homme occidental sur la nature. Tout juste dessine-t-il le portrait enjolivé d’une figure de l’armée britannique et d’une saisissante histoire. Entre thriller et aventure, le film fait vraiment le job et mériterait d’être reconsidéré.


Play-It-Again-Seb
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le 12 avr. 2023

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PIAS

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