Un effet Rashomon particulièrement sophistiqué

Hirokazu Kore-Eda est probablement le réalisateur en activité qui sait le mieux filmer l'enfance, et il le prouve encore ici.

L'innocence commence comme un thriller psychologique mettant en évidence le corsetage extrême de la société japonaise.

On est tour à tour intrigué et choqué par le premier tiers du film, qui semble traiter du harcèlement d'un élève par son professeur. On perçoit qu'il y a dans ce qui nous est montré plusieurs éléments étranges, dont on devine qu'ils seront expliqués ultérieurement. 

Dans les deux parties suivantes, le cinéaste japonais utilise un "effet Rashomon" évolué (chaque nouveau récit apporte un nouveau point de vue différent sur l'histoire), mais assez subtil (les mêmes scènes ne sont pas à chaque fois totalement rejouées comme c'est parfois le cas dans ce genre de construction).

Cette structure séduisante a valu au film le prix du scénario lors du dernier Festival de Cannes. 

Curieusement, au fur et à mesure que la vérité se dévoile (un peu trop vite à mon goût, et vers une issue un peu trop prévisible), mon intérêt a progressivement faibli, même si les principales qualités de Kore-Eda sont bien présentes : une attention extrême aux affects et à la psychologie, une grande subtilité dans l'analyse des rapports humains, une sorte de froide dureté associée à de grandes capacités empathiques. 

Les beaux plans larges, la musique envoutante de Ryuichi Sakamoto, la mise en scène millimétrique et la merveilleuse direction d'acteurs contribuent à faire de ce dernier opus un bon cru dans carrière d'Hirokazu Kore-Eda.


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le 6 janv. 2024

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