Après les rites vaudou et les boîtes de nuit de Harlem de Vivre et laisser mourir, James Bond part pour l’Asie, sur les traces d’un mystérieux tueur, Francisco Scaramanga. « L’Homme au pistolet d’or », surnommé ainsi à cause de son arme fétiche, va donner du fil à retordre à 007, de nouveau incarné par Roger Moore.


Francisco Scaramanga est un homme issu de la foire, et c’est dans un manège fatal qu’il embarque d’entrée le spectateur. Statues de cire, miroirs, le mystérieux tueur s’amuse à torturer psychologiquement sa victime avant de lui porter le coup de grâce. C’est sur une note très intéressante que débute L’Homme au pistolet d’or, qui promet d’ores et déjà une confrontation mémorable avec James Bond, car la présence à l’affiche de Christopher Lee, spécialiste des rôles de méchants par excellence, est déjà un considérable atout pour ce neuvième film. Comme toujours, Bond va devoir apprendre à connaître cet adversaire dont il ne connaît que le nom et une caractéristique physique, et partir sur ces traces.


S’engage alors une longue enquête où l’agent cherche qui nous est déjà connu, privilège de spectateur omniscient. Une enquête au bout du monde, comme souvent, pour nous faire voyager vers de lointaines contrées. Dans le rôle de Bond, Roger Moore continue de prendre ses marques, toujours avec ce côté plus détaché et chic que Sean Connery mais toujours avec une certaine virilité imposée par la production. L’Homme au pistolet d’or suit la dynamique lancée par Vivre et laisser mourir, avec une place importante accordée à l’humour, allégeant cette confrontation entre Bond et son double maléfique, pleine de promesses mais qui manque de panache.


En effet, il est difficile de ne pas voir en Scaramanga un miroir de Bond, tant son attitude et son style se calquent sur ceux de l’agent britannique, lui offrant le pire adversaire possible : une autre version de lui-même. Mais si cela pouvait donner lieu à une confrontation mythique, celle-ci se noie dans une intrigue, comme celle du film précédent, qui manque de rythme et de souffle. Après un début assez intense et prenant, le rythme semble tomber à plat, et peine à décoller à nouveau. Scaramanga manque de présence, qu’elle soit physique ou suggérée, laissant penser qu’une gestion à la Goldfinger, avec une omniprésence du méchant, paraissait plus adéquate, ou, a contrario, une longue attente avant la révélation, comme dans James Bond contre Dr. No. Mais L’Homme au pistolet d’or ne sait pas réellement sur quel pied danser. Car, après quelques répétitions, puis un virage plus sérieux manqué à cause des circonstances, la saga semble prendre le virage de l’humour, pour se renouveler, n’hésitant pas à assumer un ton parodique ou comique, comme l’illustre, par exemple, l’étonnant bruitage accompagnant l’impressionnante cascade en voiture.


Comme Vivre et laisser mourir, L’Homme au pistolet d’or ne manquait pas d’atouts. C’est un film de décors, comme, par exemple, ceux précédant le « dîner » avec Hai Fat, et ses ennemis cachés parmi les statues, ou bien les bureaux biscornus dans l’épave du Queen Elizabeth et, bien sûr, le repaire de Scaramanga et ses décors également tordus, voire expressionnistes, ainsi que ses nombreux miroirs rappelant La Dame de Shanghaï d’Orson Welles. On relève de bonnes idées de mise en scène, des fulgurances qui animent le film, mais qui ne compensent pas son incapacité à créer des enjeux et à véritablement impliquer le spectateur. Le ton un brin parodique n’aide pas spécialement, notamment dans un tel film qui pouvait offrir un duel psychologique prenant et étouffant. Mais ce n’était pas la période propice. Comme tout James Bond, L’Homme au pistolet d’or se regarde tout de même avec un certain plaisir, mais ne constitue pas un élément majeur de cette saga.


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

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le 27 sept. 2020

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