En 1970, Sergio Martino réalise L’Amérique à nu. C’est un mondo movie, un documentaire exagéré et racoleur dont le sujet n’est rien de moins que la dépravation de l’Amérique. Un sujet ironique au vu de la carrière du monsieur, notamment composée de westerns et de gialli, des films assez violents, angoissants et érotiques donc.


C’est le cas de L’Etrange vice de Mme Wardh, très populaire en son époque, probablement pour sa violence et sa sexualité assez crue. Cette dureté s’incarne dans la figure d’un mystérieux tueur qui s’en prend à de jeunes femmes, les tailladant de son rasoir. Le film ne manque pas de jeunes femmes dévêtues, mais l’érotisme du film est accru par le charme de son personnage principal. Julie Wardh est une femme de diplomate, qui s’efface devant son mari toujours occupé ailleurs. Elle rencontre le beau et charmeur George mais retrouve aussi Jean, un ancien amant, le souvenir de leurs ébats torrides et sadiques étant alors ranimé. Au même moment, le tueur semble vouloir s’en prendre à elle.


Le vice de Mme Wardh c’est sa sexualité, qui oriente la direction du personnage. Il n’est pas présenté comme amoral et le film fait bien comprendre que l’amour n’en est que plus beau s’il est consommé. Mais les séances des amours avec Jean sont aussi d’un érotisme assez troublant. Le passage dans la forêt sous une pluie prononcée rapproche les corps de façon passionnelle.


Il y a de nombreux acteurs dans ce film, tels que George Hilton, Conchita Airoldi ou Ivan Rassimov qui jouent sans fausses notes. Mais le film rayonne grâce à son actrice principale, la remarquable Edwige Fenech aux yeux de biche et au corps si aimant que la caméra ne laisse que peu d’endroits vierges de son passage. C’est aussi une des actrices les plus déshabillées de l’Italie des années 1970 entre les gialli et les comédies érotiques, et on ne se lasse pas de son corps aux charmes prononcés mais qui garde toujours une certaine innocence, sans vulgarité. C’est ce qui en fait son charme, ici respecté.


Les étoiles dans les yeux dissipés, il faut pourtant reconnaître au film d’autres qualités mais aussi certaines faiblesses. Sergio Martino offre un film avec une réalisation assez sobre, sans effets de style poussés. Certaines séquences sont bien tournées. La tentative de meurtre dans le parking joue sur le positionnement de la caméra, avec un très beau traveling de côté au niveau des roues de voiture, les éclairages et la dissimulation de la menace. L’angoisse que veut faire passer le film se ressent le plus à ce moment.


C’est moins efficace à d’autres passages. La faute aussi à un scénario qui commence très fort avec des personnages intéressants et des scènes très suggestives, et une histoire dont la chute est surprenante, mais qui déboule trop tard. S’il ne fallait résumer le film qu’à son histoire, la manière dont il joue avec le spectateur est remarquable. Mais hélas son idée principale est mal amenée, alors qu’il aurait gagné à étaler ses rebondissements bien avant. Entre le début prometteur et la fin décevante mais ambitieuse, le film subit tout de même un gros ventre mou, où l’intérêt n’est relancé que par quelques scènes dont celles dans le parking, tandis que l’idylle entre Julia et George est trop étirée.


La première excursion de Sergio Martino dans le giallo en amènera d’autres, souvent avec les mêmes acteurs. Le film est moins angoissant que d’autres, la musique est d’ailleurs assez douce et mélancolique, les morceaux d’Ora Orlandi s’apprécient même en dehors du visionnage. Si sa violence est adoucie, le film se rattrape sur son érotisme équivoque, dans des scènes passionnelles assez marquantes. Il a les défauts de la première fois, tout n’est pas du meilleur effet, mais certains passages et certaines idées démontrent un film intéressant, dont les promesses devront être étudiées dans les films suivants de Sergio Martino. Mais s’il y a bien un point incontestable, c’est que la beauté et le naturel d’Edwige Fenech joue pour beaucoup, elle est le centre du scénario et un ravissement pour les yeux.

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le 21 avr. 2020

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