Oh, Aïe

L'Attaque des fourmis géantes est encore plus métal que Doomsday. Déjà parce qu'il parle de métal tout le long, pis parce qu'on ne sait jamais si c'est une parodie ou un film profondément désastreux. L'état psychologique du spectateur oscillant entre ces deux phases toutes les dix minutes (suivant les cas, toutes les cinq suffiront), le suivre attentivement sans lâcher prise sera une tâche profondément ardue, tant il ne saura jamais s'il doit rire de bon coeur ou avoir honte de se moquer de si peu de talent.

Parce qu'on croirait, à suivre cet odieux spectacle, qu'il a été fait par une bande de potes sous alcool, fumette ou prod qui dans leur état second s'imaginèrent tabasser en communauté de la fourmis mutante en images de synthèse navrantes. Certes sympathique, l'idée de les suivre se faire plaisir n'est pas bien entraînante lorsqu'il s'agit de supporter le jeu abominable de Sean Astin en débile emperruqué (comme s'il ne voulait pas qu'on le reconnaisse) et d'un Jake Busey donnant lieu à l'une des pires imitations envisageables de Jack Sparrow.

S'il est inutile d'évoquer la nullité du reste du casting (qui jouera soit les pervers/âmes en chaleur soit les héros téméraires/inarrêtables), il reste très important de souligner le bordel qu'il entraîne à l'écran : les personnages, tous des sommets d'idiotie congénitale, agissant n'importe comment assènent aux acteurs un panel entier d'expressions forcées agrémentant un surjeu de rigueur, pour ceux qui décident de surjouer; les autres, quelles que soient les circonstances, resteront de toute façon de marbre.

Et tandis qu'il ne possède de toute évidence aucune qualité esthétique (son montage, son cadrage, ses plans, sa photographie, ses maquillages, décors et costumes, tout est affligeant), il est intéressant de se consacrer au fond de l'oeuvre, pas si stupide que ce qu'il laissait transparaître. En mettant de côté la débâcle du scénario, il est à noter la tentative de développement des personnages : aussi mauvais que cela puisse être, il reste cette tentative d'approfondissement de leurs désirs, des enjeux qui leur sont propres, de ce qui fait finalement un personnage réussi.

Forcément, c'est raté, mais pas autant qu'escompté : le rêve du guitariste raté d'enfin faire quelque chose de bon avec son groupe, non pas pour prouver aux autres ce qu'il vaut mais bien pour se montrer qu'il en est capable, sera une piste intéressante, développée de drôle de manière mais au moins évoquée; la tentative de faire quelque chose de construit, et la patience qu'il a de nous présenter chacun des personnages, leur destination, leurs obsessions et leur objectif tient du miracle dans un film de monstres sans budget qu'on attendait juste pour ses grosses fourmis et ses scènes de combat débiles.

Des attentes qu'il respecte à la règle en nous présentant un spectacle hallucinant et conscient de sa propre bêtise; c'est qu'il dépasse toujours plus les limites du bon goût et de ce qu'on en attendait, frôlant parfois la comédie volontairement z à la Sharknado. Une fille se déshabille entièrement pour lancer ses sous-vêtements sur une fourmis géante, un concert métal sauve des vies en apothéose d'une intrigue complètement stupide,

On ne sait trop quoi penser devant ce délire entre potes (enfin, j'espère que c'en est un) mettant en avant la culture métal en la caricaturant de façon bien désastreuse. C'est mauvais, c'est sûr, mais quelle expérience de voir Sam Gamegie et le blond de Starship Troopers face à des fourmis géantes en images de synthèse honteuses. On ne saurait dire, encore à la fin de la critique, si c'est volontaire ou sans aucune conscience de ce qu'il faut faire pour faire ce qu'on appelle du cinéma.