Si elle est vilaine, c’est que Rennes ne se trouve pas au bord de la mer. Mais si Saïd s’y sent oppressé c’est avant tout parce que sa famille n’accepte pas son homosexualité et le force à épouser Hadjira, elle-même obligée par sa mère de se marier pour faire oublier son temps passé en prison. Alors que la jeune femme tente de donner du sens à ce mariage arrangé, Saïd garde pour lui son orientation sexuelle et abandonne sa nouvelle épouse en multipliant les rencontres secrètes avec des hommes. Face à la pression des familles qui attendent une grossesse et sous le poids des codes conservateurs qu’ils pensent tous deux devoir respecter, Hadjira doit de plus batailler avec l’indifférence de son nouveau mari qui ne voit en elle qu’une ennuyeuse femme au foyer. Classique dans sa structure et son approche thématique, le film de Nadir Moknèche semble au premier abord respecter avec humilité tous les codes du drame intime français. Mais si l’homosexualité de son protagoniste est abordée avec peu de subtilité, le réalisateur franco-algérien s’attaque plus finement aux rapports de certaines traditions musulmanes avec l’hétéronormativité et la construction du couple marital. Intelligent bien que manquant cruellement d’inventivité, le film parvient à s’immiscer dans la vie de ces deux personnes réunies par la contrainte, obligées de trouver un compromis pour survivre ensemble. Les excellentes performances de Kenza Fortas en bru opiniâtre et de Saadia Bentaïeb en belle-mère obstinée font oublier la prestation abyssale de Zahia Dehar, à peine crédible si elle devait simplement jouer un être humain. Sans véritable sursaut ni point d’orgue, le film se contente cependant de dérouler sans grande ambition son propos politique ambigu, mélange surprenant d’optimisme et d’amertume. Car si la vie te donne des citrons, pas sûr qu’il faille les manger crus.

Cinemaxipotes
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le 18 oct. 2023

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