L'Affaire Rachel Dolezal par aaiiaao

Vu de France, on s'est beaucoup moqué de Rachel Dolezal, cette femme qui a réussi à se faire passer pour Noire pendant des années, comme une figure importante de la lutte afro-américaine aux Etats-Unis. Elle a pourtant créé une énorme polémique dans un pays où les recensements ont banalisé l'identité ethnique et où la question raciale est souvent à vif dans le débat public.
Rachel Dolezal, activiste, universitaire, prise la main dans son gros mensonge, défend que la race est une construction sociale et qu'elle peut se sentir Noire malgré un arbre généalogique blanc. On pourrait trouver ça ridicule, mais au fur et à mesure que la caméra suit Rachel dans sa nouvelle vie de paria, on se rend compte du pathétique de cette situation.
Plutôt que de questionner directement ces questions (la race comme construction sociale, peut-on se sentir appartenir à une autre "race" que celle qu'on reçoit à la naissance, au même titre que les personnes trans se sentent appartenir à un autre genre, qu'est ce que c'est qu'être noir...), le documentaire nous donne à voir en filigrane la profonde détresse identitaire de Rachel Dolezal. Maltraitées, mère de substitution pour ses frères et soeurs d'adoption (tous noirs), elle s'est construire l'identité qui l'éloignait le plus possible de cette famille haïe, jusqu'à se persuader d'être ce qu'elle clame. Jusqu'à vivre sa "blackness" par procuration grâce à ses enfants qu'elle utilise (inconsciemment) pour tenir son propos. On ressent une honnêteté et un spleen immense chez Rachel, elle se refuse à dire "oui je suis blanche", finissant même par prendre un nom à consonance africaine.
Peut-être parce que je suis blanche et que même si je les comprends, j'ai du mal à me mettre dans le même état de fureur que toute la communauté noire américaine, j'ai ressenti une profonde pitié pour elle. Elle regarde sa vie d'avant avec le désespoir de ne plus jamais pouvoir y goûter, j'ai eu l'impression qu'on jetait des pierres à une personne en grande détresse psychologique. Son cas semble unique, il est passionnant. Je lui souhaite de faire la paix avec son histoire et de reprendre ses combats, comme véritable alliée cette fois-ci.