Les Hongrois sont très forts quand il s'agit de faire dans l'autodérision. Ils ont hérité de la période communiste cette capacité à se moquer d'eux-mêmes, de leur société et des petits dysfonctionnements de la vie quotidienne. On retrouve cet esprit taquin chez Nimród Antal qui a choisi comme décor de son premier film l'austère métro de Budapest et comme personnages principaux des contrôleurs de billets.
Mais le réalisme du film s'arrête là. Pour le reste, Kontroll ressemble davantage à une fable loufoque qu'au thriller qu'on était susceptible d'imaginer.
Une fable donc, car l'histoire prend la forme d'une allégorie. Avec ce personnage principal d'abord, Bulcsú, un trentenaire dont la vie semble avoir déraillé et qui ne réussit plus à refaire surface faisant des entrailles du métro son unique lieu de vie. Et puis ces autres figures surprenantes que nous offre le film : la fille malicieuse déguisée en oursonne, le resquilleur moqueur et le méchant masqué qui semblent tout droit sortis d'un dessin animé, ou encore les responsables de la société de surveillance qui incarnent une forme moderne de déshumanisation (espionnage, défiance, mépris des conditions de travail...). Enfin, les lieux eux-mêmes sont présentés de manière irréelle comme un monde fermé, glauque, poisseux dont il serait impossible de s'échapper. L'histoire peut ainsi s’interpréter comme un conte dystopique.


Loufoque car on rit volontiers dans ce film pas comme les autres. En grande partie grâce aux quatre énergumènes qui composent l'équipe de Bulcsú et qui ressemblent davantage à une bande de pieds nickelés qu'à des professionnels de la surveillance. On s'amuse de leurs turpitudes autant qu'on compatit à leur sort. Le réalisateur emprunte tantôt à la comédie noire tantôt au comique burlesque. Et c'est très distrayant pour peu que l'on soit sensible à cet humour décapant.
Un film à découvrir qui souffre de quelques baisses de rythme et d'une musique un peu trop datée mais qui a le mérite de compenser l'absence de moyens par une inventivité scénaristique et visuelle.
Une bonne surprise.


Personnages/interprétation : 8/10
Histoire/scénario : 7/10
Mise en scène / réalisation : 7/10


7.5/10

Theloma
8
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le 2 déc. 2017

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