Comme d'hab, j'arrive un peu après tout le monde. La raison en est simple, ça m'emballait pas à la base.
En fait, je déteste cordialement les films d'espionnage, et je ne peux pas supporter la vue de cet empaffé de James Bond. Tiens, rien que d'écrire le nom de ce double zéro, j'ai failli tout à la fois m’énerver, et m'endormir.
Rien à faire, j'ai jamais pu l'encadrer ce personnage. Alors, bref, quand on m'a dit au début que Kingsman c'était un film qui se voulait une parodie de James Bond, vous comprendrez, que j'ai rapidement oublié totalement l'existence même de ce film.

Et pourtant, on ne pouvait pas me vendre le film plus mal. Parce que mine de rien, Vaughn, le James Bond, il lui fait subir ce que l'espion à l'habitude de réserver aux conquêtes féminines de ses films de vieux dégueu; il le prend de force, par derrière et sans vaseline.

Je ne vais pas trop rentrer dans le coté amusant, plein de clins d'oeil du film, pas plus que je ne vais discourir ici à propos des deux scènes de fou du film, à savoir le massacre de l'église, et le "feu d'artifice final" si je puis dire. Vous trouverez pléthore de très chouettes critiques qui parlent de ces aspects du film sur ce site comme ailleurs.
Non, moi ce qui m'étonne, c'est qu'on à l'air de dire que ce film n'a rien à dire. Et franchement, je ne suis pas vraiment d'accord. Bon, c'est pas un cour magistral plein de subtilité non plus, il faut avouer, mais c'est pas parce que Vaughn s'affuble d'un gros nez rouge qu'il ne tient pas une sorte de gros discours sarcastique et plein de mauvais esprit sur notre monde. Mais pour essayer de vous expliquer ce que j'en pense, et ce qui fait que ce film me plait, il faut qu'on reparle de James Bond.

Vous voyez, Bond, c'est un personnage totalement conservateur, qui n'évolue jamais (ou en tout cas, on rebobine toute son évolution et on repart du début à chacun de ses films), et qui est un adepte du Statu quo. James Bond, il roule pour la couronne d'Angleterre, c'est l'exécuteur des basses œuvres du pays qui n'a pas envie de se salir les mains, ni de se taper la sale besogne. James Bond, c'est qu'un éboueur qu'on cache derrière du strass et du bling bling. En gros, plus ou moins un gros con du genre toutou à sa mémère qui fait là où on lui dit de faire.

Tout l'inverse donc du jeune héros de ce film, venant des quartiers populaires, qui va se mettre à bosser pour une agence indépendante des gouvernements trop facilement corrompus, s'inspirant largement des mythes arthuriens, et permet d'inscrire les Kingsman dans une tradition basée sur l'honneur, et un certain sens de la justice . De plus, le jeune héros va évoluer dans le film, et va apprendre à devenir un gentleman. Et un gentleman, ne se voit pas à sa manière de s'exprimer, mais de se comporter avec les autres.
Le jeune homme se comportera d’ailleurs de manière exemplaire avec le gente féminine, et même lorsqu'il s'agira de prendre la température d'une princesse scandinave avec son gros thermomètre , il y aura été invité par celle-ci en guise de récompense pour avoir sauvé le monde. Autrement plus classieux que l'homme au martini dry qui à ma souvenance à pas mal forcé la main à certaines pour s'introduire dans le saint des saints avec toute la classe d'un routier analphabète.
En plus, dans les James Bond, on jette un voile pudique sur les ébats, et on a pas à ma connaissance le droit à un superbe plan sur un cul non moins superbe en guise de conclusion, démontrant encore une des qualités du gentleman: un refus exacerbé de l'hypocrisie.

Est ce que ce ne serait pas un moyen pour le réalisateur de montrer une éducation, et un sens du devoir plus développé chez notre protagoniste issu d'un milieu modeste? Je ne suis pas loin de le penser.

Et puis surtout, au delà de l'aspect individuel, Vaughn parle également de l'aspect collectif avec un mauvais esprit flagrant et assez jubilatoire enfoncé à gros coup de marteau tout au long du film, et qui consiste à dire: Dites, les pauvres, plutôt que de vous entre tuer, est-ce que vous ne devriez pas faire sauter la tête des principaux responsables de votre malheur, à savoir, vos dirigeants, et les nantis profitant de votre massacre permanent pour préparer un joli monde qui n'appartient qu'a ceux qui auront les moyens de survivre à la catastrophe annoncée par le méchant du film (incarné par un Samuel L Jackson zozotant à merveille)? Dans le même temps, Vaughn en profite aussi pour tourner en dérision les fantasmes d'éradication du genre humain par une élite du NWO chers à pas mal de tenants les plus farfelus des théories du complot. Il y parvient car le film joue sur plusieurs tableau, à la fois allégorique, et fait de détournements joyeusement idiots d'un autre coté (preuve de l'intelligence du script de Vaughn)

Le méchant a d'ailleurs parfaitement raison dans le constat déprimant qu'il fait lorsqu'il dit à un moment qu'il n'y a absolument aucun moyen pour l'humanité de se sortir du pétrin dans laquelle elle s'est elle même fourrée au niveau climatique et écologique. ça m'a pas mal surpris de voir dans un blockbuster un propos aussi peu glamour et pourtant tout à fait véridique, jeté aussi platement, comme ça, l'air de rien en passant.

C'est tout ça qui sauve le film pour moi, et lui permet de passer à un autre niveau que simplement du cool jeté à la louche sur vos petits yeux ébahis (mais je le répète, du cool, il y en a, et certaines scènes sont de véritables bijoux, mais allez donc voir d'autres critiques qui en parlent bien mieux que je n'en serais capable).

Bref, Kingsman, sous des dehors de grosse farce méta a bel et bien des trucs à dire, même s'il ne s’embarrasse pas d'une très grande subtilité pour le clamer, tout en jouant de ce manque de subtilité. Moi, je me dis que si Verhoeven et Carpenter ont vu ce film, ils ont du avoir un petit sourire aux lèvres, en se disant qu'il y avait encore des gens pour faire dans l'incongru et que la satire acide avait encore de beaux jours devant elle à Hollywood.

Samu-L
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le 19 mai 2015

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Samu-L

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