L'Endoctrinement des jeunesses hitleriennes vue par des yeux d'enfant..

Pari risqué que ce film qui ne ressemble à aucun autre.
Certes, on y trouve une filiation avec le Chaplin du "Dictateur," avec le Benigni de "La Vie est belle" par la volonté d'adoucir une réalité insupportable, ou encore de Wes Anderson dans le traitement absurde, farfelu et coloré des situations . Mais pas seulement...Waititi développe une manière originale et délicate de jongler avec les situations qui parvient à vous coincer le rire dans la gorge par une émotion soudaine qui relève du Grand Art .
Johannes est un enfant doux et peu sur de lui qui attend avec impatience le jour de son adoubement lors d'un camp aux jeunesses hitlériennes, fasciné par les rituels et les discours nazis, le jeune enfant confie ses doutes à un ami imaginaire qui n'est autre que Hitler lui-même !
Lors de ces séances "d'entrainement à tuer", le gamin sommé d'occir un lapin, ne parvient pas à le faire et devient alors la risée de tout le campement et des instructeurs qui l'affublent du surnom de JOJO RABITT
Lorsque Jojo découvre dans son grenier, une jeune fille juive, cachée par sa mère (Scarlett Johanson résistante de l'interieur) le jeune enfant déploie tous les clichés du racisme le plus ignoble avec la candeur de son age et de son cerveau passé à la grande lessiveuse nazie..Rien de drôle dans cela, rien de tendre, et pourtant...L'irrésistible charme du jeune Roman Giffin Davis et les subtiles nuances du scenario nous font regarder cette horreur connue de l'histoire récente avec la candeur et la cruauté de l'innocence enfantine. Innocence volée à toute une jeunesse embrigadée de force à laquelle le film semble être un requiem-hommage. Aucune ambiguïté possible , aucune complaisance malgré la poésie et l'humour. On ne saurait se méprendre sur les intentions du réalisateur.
Le plan (attention spoler) ou Jojo découvre sa mère pendue avec d'autres résistants est d'une force incroyable. On ne voit que les pieds qui se balancent et l'enfant lui renoue ses lacets comme celle-ci lui apprend à le faire durant une bonne partie du film.
Les comédiens sont parfaits : Sam Rokwell campe un adjudant instructeur déjanté , baroque qui charge avec un costume à plumes digne de Wagner et révèle une humanité génereuse dans le final. Il est possible de ne pas adhérer à cette dérision et de ne pas entrer dans ce film..Mais c'est dommage car c'est une réalisation exceptionnelle, un bijou cinématographique rare.