J'ai finalement cru à tout et découvert une histoire et amour extra-ordinaires.

"...tout en moi lui appartient, et je ressens le plus doux des frissons, rien qu'à prononcer son nom"

J'exagère sans doute la note d'une ou deux étoiles, mais j'ai vraiment pas zappé une seule fois en le regardant et suis encore tout surpris par cette histoire et tous ses lieux de tournage.

Je l'ai commencé hier soir sur Tv5 monde (où il est encore visible à la demande) en pensant ne voir que son début puisque je visais un autre film ailleurs, mais je suis resté: les acteurs le vendent et rendent crédibles, car sonnent et jouent juste.

Elsa Zilberstein, si rentre-dedans en interviews, montre qu'elle aime son métier et sait se faire oublier: on croit au personnage; elle sait jouer l'amour si sincère. (Son ami(e) doit d'ailleurs être inquiet(e)? ^^ ) .

Même Hippo Girardot( dont j'aime aussi les chroniques radio) sonne tout le temps juste.

Je n'ai pas pensé à la différence d'âge ou à une quelconque perversion ou libidineuse sordide affaire du tout: c'est un vrai couple qui n'est pas plus ridicule ou 'incrédible' que par exemple celui de Cornish et Whishaw dans mon Bright Star.

Ignare , je ne connaissais pas cette histoire et vie romantiques de Léon Blum...le tout m'a beaucoup bluffé: notamment les sordides lieux d'emprisonnement et mesquineries judiciaires de Vichy et Pétain...qui se retournent contre eux tant les preuves de l'incompétence sont alors révélées dans une sorte d'effet Barbara Streisand...les accusateurs se révélant les coupables de la guerre (en très très gros; je sais que je suis superficiel mais ce n'est pas la partie de l'histoire qui m'a le plus ému et plu).

Les extraits de belles lettres par exemple me resteront sans doute plus en tête, surtout que je vis une sorte de situation un minuscule similaire..."voilà 30 jours que je l'ai vu(e)"...ça donne envie de lire leur correspondance si elle a été publiée (le film est adapté du livre à l'aussi bon titre, de Dominique Missika, Je vous promets de revenir).

Me restera aussi la fin qui se passe à Buchenwald, à côté du camp: elle m'a a-ba-sour-di! Abasourdi! Si ! Si! Je ne savais pas du tout que Blum était prisonnier à côté de ce cercle de l'enfer manufacturé par des hommes, qu'il y était en couple, enfermé avec son opposant politique, Mandel (un étonnant Jérôme Deschamps, dramatique alors qu'il m'a notamment tant fait rire sur scène à Villeurbanne)...

Ils sont même aidés d'un majordome en tenu de prisonnier de camp!

J'ai encore du mal à le croire.

J'ai aussi eu froid dans le dos de voir une scène de ce film en 2023 en pleine guerre d'Ukraine quand j'ai entendu Jeanne Reichenbach s'étonnait que les matons sur les miradors du camp de concentration leur crient dessus "en Russe"...et Blum de lui expliquer que ce sont des sortes de mercenaires "Russes", que les Allemands ont recruté sur "le front de l'Est" en échange de leur vie ...ça m'a glacé: "ce sont des vraies brutes" (film de 2019!).

Reste que ce fût l'endroit de sa proposition de mariage...qu'ils furent mariés par des Allemands avec le prisonnier du camp derrière eux?! Ma mâchoire s'est ouverte.

Blum a t il vraiment proposé à sa chérie sous les barbelés de Buchenwald, et ont ils célébré leur mariage avec du crémant partagé avec Mandel et leurs geôliers?

_"...je crois qu'il est temps pour moi d'honorer ma promesse." (le motif qu'elle avait d'ailleurs utilisé pour le rejoindre dans son camp de prisonnier en Allemagne alors qu'elle pouvait fuir).

Drôle d'endroit pour une demande en mariage? (même si discutée avant et même si plutôt ignorant des assassinats d'à côté quoique "l'odeur" est souvent insoutenable, dit Blum):

_"...les conditions ont l'air atroces...Joachim en vient mais il ne veut pas en parler...aujourd'hui on ne sent pas trop l'odeur...une odeur qui prend à la gorge, on s'habitue mais parfois, c'est épouvantable" (Leon Blum à Buchenwald)

_"...une chose est étrange...on entend pas les oiseaux, il y a des bois tout autour, mais on entend pas chanter les oiseaux" (Jeanne Reichenbach à Buchenwald, "la fôret de hêtres" comme le lui apprenait, content de lui, Pierre Laval).

Un film sur l'amour, mais aussi sur l'amitié : la relation entre la belle-fille et la maitresse du papa priapique et vert, m'a aussi séduit. Emilie Dequenne joue très bien la quasi haineuse, dédaigneuse au début, puis l'amie sincère et solidaire.

Je l'avais commencé à cause du nom de Laurent Heynemann qui m'avait tant ému,choqué et fait rire avec Jeanne Moreau en Vieille qui marchait dans la mer (1991).

Je n'y connais rien mais Heynemann me rappelle Tavernier: car je ne suis pas certain qu'ils aient les budgets à la hauteur de leur talent mais ils semblent savoir optimiser les décors, costumes, musique et acteurs pour rendre le tout classieux et riche.

Par exemple même "La rupture", film plutôt petit sur Chirac et VGE m'avait plu (2013).

Ou son film sur Bérégovoy et même celui sur Bousquet avec un effrayant Daniel Prévost. Bousquet apparait d'ailleurs ici dans un hors-champ lors de la scène avec Pierre Laval (Torreton en contre-emploi) qui semble refuser à Jeanne/Janot le laissez-passez qu'elle demande mais elle lui a forcé la main car elle a avant demandé à encore plus haut dans leur hiérarchie pourrie en passant par Bousquet puis Vichy (j'ai oublié les détails).

Je n'ai compris le titre que lors de la scène où Mathilda May le chante: elle joue celle que je croyais être Cora Vaucaire mais est appelée Cora Madou (qui a aussi existé); la chanson est "Je ne rêve que de lui" de "Jean Bertet, Emile Gitral - Vincent Scotto" créée en 1935:

_"...tout en moi lui appartient, et je ressens le plus doux des frissons, rien qu'à prononcer son nom...je ne rêve que de lui, il me hante, me tourmente...sans cesse le jour la nuit son image me poursuit...(...) et grisée, je crois entendre sa voix si tendre...qu'il met tout en émois malgré moi...".

J'ai appris que Blum a été enfermé dans un fort en montagne, proche de l'Espagne: c'est là où les familles viennent rendre visite péniblement. Je ne sais pas si ces scènes sont véridiques, surtout la scène de photo prise par Janot de Blum et sa belle-fille (je ne la trouve pas sur le net). Mais ces scènes dans le Fort sont très bonnes: son amoureuse lui offre un pull de Noël et sa belle-fille des moufles à pompons rouges...Blum offre à Janot (devant sa fille!), l'érotique? 'Les chansons de Bilitis' de Pierre Louys (Jeanne devine alors d'où venait son inspiration de "ses lettres enflammées...", belles et très détaillées, dans le précédent lieu de détention):

_"...ce petit livre d'amours antiques est dédié respectueusement aux jeunes filles de la société future" lit Jeanne Rochenbach (éveillant alors ma curiosité...Blum et elle étant alors mes éclaireurs SC).

Il offre à sa belle-fille entre autre La mort du loup d'Alfred de Vigny, lisant le passage qu'il pensait "pompeux" puis finalement "pas si mal" puisque résonne avec leur situation:

_"...gémir, pleurer, prier, est également lâche. - Fais énergiquement ta longue et lourde tâche - Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler, - Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler."

En autres détails, le générique de fin dit:

__ que le buste de Georges Clémenceau si cher à Mandel/Deschamps, supposé lui "porter chance", ce qu'il corrigera par un bien plus beau et émouvant "me donner courage"...serait d'un Henri Bouchard.

__que la chanson que fredonne Janot en repassant les chemises de Mandel est "Heidenröslein de Franz Schubert"...Mandel lui reproche car c'est en Allemand et la conversation et confrontation dans cette toute petite scène de "col" et "d'amidon" est alors en fait passionnante et clé, car rappelle de ne pas mélanger "l'Allemagne d'Hitler" à celle de "Schubert/Beethoven/Goethe"; qui, ironie du sort, avait pour habitude de se promener dans "les collines de Buchenwald" (selon Pierre Laval/Torreton) où se retrouvent Janot et Blum, qui avait consacré un essai à Goethe.

__maintenant que je découvre les paroles en Français de la chanson chantée en Allemand par Janot/Elsa Zilberstein, je comprends mieux la scène et l'importance du choix et le tort de Mandel car ces paroles de Goethe (si j'ai bien compris), illustre une résistance de la beauté face à la cruauté:

_"Un garçonnet vit une rose,

Petite rose, sur la lande,

Si belle, du jour tout juste éclose,

Il accourut pour la voir

Et l'observa, plein de joie.

Petite rose, petite rose rouge,

Petite rose de la lande.

Il dit : Je vais te cueillir

Petite rose de la lande .

La rose dit : Alors, je te pique

Ainsi, de moi, tu vas te souvenir,

Car, je ne veux pas souffrir .

Et le garçon brutal cueillit

La petite rose de la lande;

La rose piqua, se défendit.

Douleur et cris n'aidèrent en rien,

Elle souffrit néanmoins.

Petite rose, petite rose rouge,

Petite rose de la lande. "

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le 14 févr. 2023

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PierreAmo

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