Un film de Guitry qui n’est pas la meilleure de ses réalisations mais qui est plus avant-gardiste qu’il n’y paraît. Saluons donc cette comédie légère, savamment construite. Différents éléments narratifs et cinématographiques d’une grande modernité ont apporté beaucoup au cinéma.


En premier lieu, il nous faut parler de « l’honnêteté » de Guitry qui raconte et introduit son film en présentant les lieux de tournage, les acteurs et les équipes de réalisation et de production. Si cette pratique tient de la marque de fabrique du maître, elle est originale pour ce film car elle met ironiquement en scène ce dernier. Notons d’ailleurs que dans les premières minutes, Guitry s’amuse à se présenter sous trois formes différentes en qualité d’auteur, d’interprète et de réalisateur renvoyant subtilement au titre de son œuvre.


On peut également applaudir les partis pris scénaristiques et la mise en scène. Guitry, par un jeu savant – pour l’époque ! – utilise Blier pour interpréter le mari cocu et le mari trompeur. Le jeu de la caméra est suffisamment vif, intelligent et bien mené pour que l’illusion soit crédible.


Il faut enfin souligner la beauté de la photographie et des choix des lumières approfondissant avec éclat cette histoire soignée. En effet, le rôle de la pénombre, de la nuit et de la lumière du jour est pesé. Tous ces éléments soulignent, constamment, tout au long du film, un sentiment ou une situation amoureuse. Ainsi la lumière du jour est celle appuyant la parade amoureuse chez chacun des personnages. La pénombre et la lumière des lampes viennent éclairer la séduction et la confession. La nuit marque la force du jeu dans sa totale acceptation : jeu de théâtre, jeu de dupe, jeu d’amour, jeu de rôle…


Pour le reste, l’histoire est des plus communes. Les ficelles très conventionnelles du Boulevard sont là, font leur œuvre et nous laissent un peu las de ces facilités.


Sans être une comédie de mœurs passionnante, Je l’ai été trois fois s’applique avant tout à questionner les rapports homme femme au prisme du « jeu ». Guitry, homme venu du théâtre, nous offre un véritable film, très plaisant et très léger – trop sans doute… – sorte d’hommage au théâtre et aux jeux de l’amour.

ThomasValero
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le 18 août 2017

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